National | Par Didier Bouville

Sécheresse : une situation atypique [point de vue]

La semaine dernière, à l’occasion d’un déplacement dans l’est de la France, Didier Guillaume, ministre de l’Agriculture, a annoncé des mesures de soutien aux agriculteurs victimes de la sécheresse. Joël Limouzin, vice-président de la FNSEA, prend acte mais attend des mesures plus ambitieuses.

– Quel est impact de la sécheresse sur le monde agricole ?

«Au moins 70 départements sont très impactés. Cette sécheresse est atypique car elle a commencé en juillet et dure encore. Même si la pluie semble maintenant arriver, les dégâts sont faits. La situation est également atypique car les récoltes de printemps ont été satisfaisantes en volume, notamment en herbe, mais la sécheresse de cet été a fait brûler l’en- semble des cultures. Tous les secteurs ont été touchés, notam- ment l’élevage au travers des prairies, mais les conséquences sont aussi importantes pour le colza. Les semis ont été catastrophiques. Le stress hydrique les a empêchés de lever. De plus, la sécheresse et le froid qui arrive pourraient avoir des conséquences sur les récoltes de grandes cultures en 2019 et sur la pousse de l’herbe de printemps qui devrait redémarrer difficilement. Nous alertons d’ores et déjà sur l’impact de la sécheresse en 2019.

– Comment accueillez-vous les mesures annoncées par Didier Guillaume vendredi dernier ?

Nous prenons acte des 15 millions d’euros débloqués pour l’exonération ou l’allège- ment des cotisations sociales. Mais il ne s’agit pas d’une nou- velle mesure, elle avait déjà été annoncée. Nous prenons également acte de la volonté de systématiser l’exonération de la taxe sur le foncier non bâti. Nous regrettons la non-prise en compte de la revendication FNSEA sur la mise en place d’une avance des trésoreries PAC à hauteur de 90 %. Dans certains départements, des agri- culteurs n’ont même pas reçu l’acompte de 70 % annoncé par le ministère. De plus, dans cer- tains départements il est diffi- cile de reconnaître la situation de calamité agricole en raison des critères actuels. Pour avoir cette reconnaissance il faut jus- tifier de 30 % de pertes fourra- gères et de 13 % de pertes du produit brut d’exploitation. Ce critère ne prend pas en compte le fait qu’il a fallu nourrir les animaux cet été et cet automne avec les récoltes de printemps. Si l’on prend en compte ce critère on arriverait à 45 % de pertes dans certains départements.

– Quelles sont vos demandes pour soutenir les agriculteurs ?

Nous souhaitons que le fameux 13 % de produit brut soit révisé. Il faut continuer à encourager le développe- ment des assurances en utili- sant des outils d’analyses de plus en plus précis et adaptés à la diversité des exploitations, pour estimer les pertes de production. L’exercice consiste donc à préserver un système qui incite à aller vers l’assurance tout en ayant un dispositif calamité efficace pour répondre aux enjeux de solidarité. Nous attendons un affichage clair du ministre sur ce sujet . Les agriculteurs veulent aussi, pour évi- ter la décapitalisation des cheptels, savoir qu’il va y avoir un dispositif pour moraliser le prix des fourrages».

Lire aussi dans la Volonté Paysanne datée du jeudi 8 novembre 2018.

 éleveurs+sécheresse+FNSEA

Les mesures de soutien annoncées par le ministre de l’Agriculture

Lors d’un déplacement dans la Meuse et dans les Vosges, vendredi 26 octobre 2018, Didier Guillaume, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation a annoncé de nouvelles mesures de soutien au agriculteurs victimes de la sécheresse.

A cette occasion il a annoncé que la procédure de reconnaissance des calamités agricoles a déjà été enclenchée. Trois comités de gestion des risques en agriculture se réuniront exceptionnellement en décembre, janvier et février pour examiner les dossiers.

Un communiqué du ministère indique que le dépôt des dossiers est ouvert jusqu’au 12 novembre 2018, pour le comité national de gestion des risques en agriculture (CNGRA) de décembre.

Didier Guillaume a également indiqué que le dégrèvement de la taxe sur le foncier non bâti (TFNB) est simplifié pour les zones sinistrées par une procédure de dégrèvement d’office, activée dès que les taux de pertes seront transmis à la direction départementale des finances publiques. Il a aussi annoncé le report ou allègement du paiement des cotisations sociales auprès des caisses MSA, une enveloppe de 15 millions d’euros vient d’être ouverte pour l’ensemble des intempéries de 2018.

De plus, un acompte de 50 % sur les indemnisations « calamités agricoles » sera versé pour les agriculteurs qui ont recours à la télédéclaration. Enfin, le communiqué du ministère précise la mise en place de dérogations à certaines obligations liées à l’application des directives nitrates, notamment une plus grande souplesse en ce qui concerne les obligations de couverture automnale des sols.

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