Aveyron | Par Jérémy Duprat

Médecines alternatives – Homéopathie : un troupeau en meilleur santé et moins d’antibiotiques

Arrêter d’utiliser systématiquement des antibiotiques. Voilà le but initial de Nadine Izard lorsqu’elle a commencé à se former à l’utilisation de l’homéopathie.

Installée avec son mari depuis 1999, au sein d’un élevage de vaches laitières, Nadine Izard s’est lancée il y a 8 ans dans les médecines alternatives. Et plus précisément l’homéopathie. «C’est à ce moment que nous nous sommes convertis en agriculture biologique. Mais ce n’est pas cette conversion qui a motivé la formation et l’utilisation à l’homéopathie. J’ai d’ailleurs commencé quelque temps avant la conversion en bio. J’avais vraiment ce souhait de réduire notre consommation d’antibiotiques. Je constatais que ces médicaments ne fonctionnaient pas toujours, surtout quand ils étaient utilisés de façon trop préventive», résume Nadine Izard.

Il y a deux ans, l’éleveuse est passée d’une traite en salle au robot. Son utilisation de l’homéopathie s’est adaptée avec ce changement. «Avant, j’utilisais l’homéopathie vraiment en observant le lait qui sortait du pis. S’il y avait des grumeaux par exemple. Chaque jour j’étais à même d’observer chaque vache pendant la traite. Avec le robot, il faut s’adapter. Je regarde davantage les symptômes généraux, la météo, l’ambiance du bâtiment… C’est très technique. Par contre, le robot aide avec le compteur de cellules, il identifie le quartier. Il me donne un certain nombre d’informations qu’il faut que je confirme. Il me donne des faits sans les raisons sous-jacentes. C’est là que mon travail et mon regard interviennent pour traiter l’animal. Une mammite peut avoir différentes causes et donc différents traitements», explique l’éleveuse.

Pour identifier correctement ces multitudes de facteurs, Nadine Izard a suivi des formations depuis 8 ans. «J’ai commencé avec Hervé Grasset. Nous étions plusieurs éleveurs débutants. Il nous a appris toute la théorie et la pratique sur le terrain, en tournant sur nos fermes, pour observer des cas concrets et des environnements différents. L’homéopathie fonctionne de cette façon. Il n’y a pas un médicament pour une maladie, mais plutôt un traitement pour une cause spécifique : un animal qui est stressé, qui est malheureux, qui ne rumine pas… Un même produit peut traiter une vache qui boîte ou une mammite, parce que la cause est la même. L’homéopathie passe par l’étude du cas particulier d’un animal», développe Nadine Izard.

Un travail pointu. Au bout de 8 ans, l’éleveuse peut se targuer d’avoir appris énormément et de gérer plus facilement l’état de son troupeau. «Je ne suis pas une sorcière non plus», plaisante Nadine Izard. «Il y a encore des cas où je ne suis pas experte. J’en apprends tous les jours et à chaque formation. C’est presque comme si j’avais encore plus à découvrir qu’au début, au fur et à mesure que nous affinons la pratique», s’étonne Nadine Izard. Elle suit 3 jours de formation chaque année. Elles sont proposées par l’ADPSA, en partenariat avec la Chambre d’agriculture et JA.

Après plus de 8 ans d’utilisation de l’homéopathie, la ferme a réduit considérablement son utilisation d’antibiotiques. «Sur des cas de mammites par exemple, la différence est flagrante. Nous n’utilisons les antibiotiques que dans les cas les plus récalcitrants. Nous avons une vache en ce moment que nous traitons avec les antibio par exemple. Sur une année, nous devons être à un dixième de ce que nous utilisions avant. L’homéopathie a également un bon effet au niveau boîteries. Après, ce n’est pas non plus un remède miracle. Au niveau frais de vétérinaires, utiliser l’homéopathie n’a pas d’effet lors d’avortement, césarienne, déplacement de caillette… Il ne faut pas se leurrer. Le vétérinaire et les antibiotiques restent indispensables dans certains cas. Par contre, la santé générale du troupeau est meilleure maintenant que nous traitons les animaux de façon plus préventive avec l’homéopathie», assure Nadine Izard. Une affirmation que l’éleveuse tempère, notamment parce qu’il y a deux ans, le passage de la salle de traite au robot a provoqué une augmentation des cellules. Aujourd’hui, la situation s’est stabilisée et revient à la normale.

Qu’en est-il de l’impact de l’utilisation de l’homéopathie, avec un troupeau en meilleure santé, au niveau qualité et quantité de lait ? «J’ai l’impression que oui pour la quantité. En tout cas, les baisses de production sont moins importantes. Une vache affaiblie, si vous la stimulez un peu notamment au niveau du foie, comme lors d’une cure de vitamine, son état s’améliore, elle produit à un niveau normal rapidement. Après au niveau qualité du lait je ne pense pas. En tout cas, rien n’indique que c’est le cas. Par contre, nous écartons moins de lait avec une utilisation drastiquement réduite des antibiotiques. C’est une conséquence bénéfique. Et un confort pour nous. Alors aujourd’hui, c’est sûr que le robot écarte lui-même une vache sous antibio. Mais avant, il fallait que ce soit nous qui veillions à écarter le lait», explique l’éleveuse.

Le plan éco-antibio et l’image du grand public, un facteur dans l’utilisation de médecines alternatives. «C’est ce que je pensais sincèrement quand je me suis lancée dans l’homéopathie. Aujourd’hui, avec le chemin suivi par le grand public au niveau du bio, je vois bien que les gens s’en fichent. Ils ne font pas confiance d’une part et regardent d’abord le prix d’autre part. L’homéopathie c’est pareil : nous sommes dans une démarche naturelle, nous essayons de ne pas traiter systématiquement avec des produits antibiotiques. Nous ne sommes pas valorisés à la juste valeur de nos pratiques. C’est frustrant, mais ce n’est pas grave, je continuerai : j’aime ce que je fais et comment je le fais», sourit Nadine Izard.

Jérémy Duprat

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