Aveyron | Par Elisa Llop
Lucie Ferrié élève ses chèvres depuis début 2022, après avoir repris l’exploitation de son père, ancien éleveur de vaches Brunes, parti récemment à la retraite.

A Sainte-Radegonde, Lucie gère un troupeau de 200 chèvres alpines. Chaque année, elle garde une soixantaine de chevrettes pour le renouvellement et dispose d’une douzaine de boucs pour la reproduction. Boucs provenant exclusivement de l’extérieur, afin de renouveler la génétique. Les chevreaux de quelques jours, partent tous à l’engraissement avec la coopérative des Chevriers du Rouergue. «C’est vrai qu’on nous demande d’engraisser de plus en plus nos animaux. Mais ce n’est pas forcément possible pour toutes les exploitations, pour des raisons pratiques, d’infrastructures et de temps» explique-t-elle.
Indépendante mais pas seule
La jeune femme, qui travaille seule sur son exploitation, peut quand même compter sur sa famille pour l’épauler si besoin, ainsi que sur un voisinage d’agriculteurs. Elle apprécie la transmission et l’accueil de stagiaires. «Nous avons transformé intégralement tous les bâtiments pour les adapter aux caprins. Tout a été également simplifié, aménagé de manière fonctionnelle, pour que j’ai le moins de difficultés». En décembre 2023, un bâtiment de stockage pour le foin a été ajouté, un couloir central dans le bâtiment central pour l’alimentation, et le prochain projet est d’automatiser l’alimentation.
Côté parcours, Lucie est passée par un bac STAV au lycée La Roque, puis un BTS PA, avant de travailler 5 ans comme conseillère technique en laiterie, aux côtés des producteurs. Cet apprentissage l’a emmenée à la découverte de diverses régions : Pyrénées-Atlantiques, Mayenne, Bretagne, Pays-de-la-Loire…
«Je m’intéressais déjà aux chèvres à cette époque… Un été, j’ai remplacé un producteur caprin et cela m’a vraiment plu. J’adore les vaches mais je voulais être indépendante sur mon exploitation et pour gérer mon troupeau ; c’est vrai que des animaux plus petits, c’était plus pratique, mais aussi une évidence. Les chèvres sont vraiment des animaux à part. On a un lien différent, très confiant, je sens beaucoup de reconnaissance de leur part».
Lucie élève son troupeau en cycle de reproduction naturel, en monte naturelle en septembre, avec un pic de naissances en février. «Contrairement aux ovins, les chèvres ont gardé l’instinct, en général, de ne pas mettre bas de nuit. Cela arrive souvent qu’elles mettent bas exactement au même moment, et souvent, quand je viens auprès d’elles».
Trouver le rythme qui convient
«J’ai fait ce choix de rester dans ce cycle car je souhaitais coller au naturel. Cela fonctionne très bien. Certes, je me retrouve sans lait pendant 2 mois et je pourrais certainement produire davantage en lactation longue, mais ce rythme me va bien ; il suffit d’anticiper cette période creuse, cela me permet de faire autre chose» explique Lucie. Egalement passionnée de génétique, elle ne s’interdit pas de passer une partie de son troupeau en insémination artificielle.
Lucie, en conventionnel, livre à Lactalis en moyenne 200 000 l annuels, en bi-traite journalière. Elle est membre du bureau de l’organisation de producteurs en lait de chèvre. Elle n’est actuellement pas encore en contrôle laitier, ce qui est également en projet pour optimiser sa production.
Sur son exploitation de 62 ha, elle est autonome en fourrages (foin, ray grass, trèfle et luzerne ainsi que des céréales dont, pour ces dernières, elle ne garde que la paille tandis que le reste est vendu).
Ses chèvres ne pâturent pas, pour des raisons pratiques (gestion des clôtures…) mais aussi pour éviter les parasites. Lucie songe à leur aménager une petite cour à l’extérieur.
L’éleveuse dresse un bilan plutôt positif : «M’étant installée à la fin du covid, je m’attendais au pire, mais finalement, malgré ce contexte de crise, le lait de chèvre suit une conjecture plutôt favorable, donc je suis assez confiante».
La viande de chevreau ? «Une viande raffinée et une très bonne alternative à ceux qui n’aiment pas le fort fumet de l’agneau».
Elisa Llop