National | Par La rédaction
La FNSEA juge le système de gestion des risques climatiques « inopérant » pour indemniser les éleveurs dont les prairies ont été dégradées par les excès de pluviométrie et les épisodes de grêle.
Le système de l’assurance récolte pour les prairies est une nouvelle fois remis en cause par les associations spécialisées (AS) animales de la FNSEA (FNB, FNPL, FNO, FNEC), qui dénoncent les engagements « non tenus » du ministère. Après avoir pointé les limites du dispositif de gestion des risques climatiques pendant les épisodes de sécheresse en 2022 et 2023, elles déclarent dans un communiqué du 25 juillet que celui-ci est « inopérant » sur la détection des pertes liées aux aléas climatiques rencontrés par les éleveurs cette année : excès de pluviométrie, orages, grêle… « Un peu partout en France, des prairies ont été inondées, certaines sont toujours sous l’eau », rappelle le président de la FNB (viande bovine), Patrick Bénézit. « Tous les risques doivent être couverts, c’est ce qui est prévu par la loi et l’outil actuel ne répond pas à ces situations », affirme-t-il.
L’indice IPP (dit « Airbus »), qui sert de référence pour le déclenchement des indemnités, est calculé à partir d’images satellites. Or, « avec le satellite, on ne voit pas ces aléas », affirme le directeur de la FNPL (lait), Benjamin Guillaumé. « Nous avons beaucoup de remontées d’éleveurs qui nous disent que leur assureur ne va pas prendre en compte leurs pertes parce que l’indice ne les montre pas », indique-t-il.
Pacifica défend l’indice Airbus
« L’indice n’est pas encore affiché, il le sera dans quelques jours pour nos clients assurés », s’étonne Jean-Michel Geeraert, directeur du marché de l’agriculture et de la prévention chez Pacifica (Crédit Agricole). Contacté, Groupama, n’était pas en mesure d’apporter une réponse pour le moment. Jean-Michel Geeraert, de Pacifica, explique que « l’indice mesure la fraction de couvert vert de la prairie et son évolution rapportée à la moyenne olympique ou à la moyenne des trois dernières années ». Il défend la pertinence de l’outil de mesure satellitaire en cas de forte pluviométrie ou de grêle. « Quand la fraction reste très verte, ça veut dire qu’il y a de la pousse. Si une inondation provoque un jaunissement ou un pourrissement de l’herbe, l’indice sera inférieur aux années précédentes », poursuit-il. Le calcul de l’indemnité se fait « au début du mois de novembre » sur la pousse totale de l’année.
Cependant, même quand l’herbe pousse, la récolte peut être pénalisée par les excès d’eau, pointent les éleveurs. « La qualité de l’herbe se dégrade et les exploitants ont des difficultés pour aller la faucher. Ils ne peuvent pas entrer dans les prairies avec les tracteurs et cela pose parfois même des difficultés pour les animaux », souligne Raphaël Guyet, le directeur de la Fnec (éleveurs de chèvre).
Là encore, Pacifica assure que cet aspect a été pris en compte dans son offre assurantielle. « Quand l’inondation est persistante et empêche la récolte, nous proposons un système d’indemnisation forfaitaire dans notre produit d’assurance. Sur 5 000 contrats en portefeuille en 2024, nous avons eu une soixantaine de déclarations d’exploitants dans l’impossibilité de récolter ou de faire pâturer leurs animaux », indique Jean-Michel Geeraert. En revanche, la perte de qualité des fourrages « n’est pas une garantie proposée à ce jour ».
La FNSEA demande des « expertises de terrain »
Pour contrebalancer l’indice satellitaire, la FNSEA est favorable aux expertises de terrain. « Il faut que la puissance publique permette des recours avec des expertises de terrain, comme cela existe en céréales, en viticulture, en arboriculture », affirme Patrick Bénézit de la FNB. « Pour d’autres cultures, l’expertise humaine est plus facile car des documents comptables permettent de créer la référence historique de l’exploitation et d’estimer les pertes de récoltes. En prairies, nous souffrons d’insuffisance, voire d’inexistence, de référence historique ce qui a conduit les assureurs à se diriger vers une assurance de type indicielle », explique cependant Jean-Michel Geeraert.
En réponse aux critiques du monde agricole, le ministre de l’Agriculture démissionnaire Marc Fesneau s’était engagé au printemps à revoir le décret encadrant les possibilités de recours contre l’indice et à développer le réseau de 350 « fermes de référence » de l’Observatoire national de la pousse de l’herbe, en incluant 200 fermes supplémentaires. Ces deux dossiers sont « en suspens », indique Benjamin Guillaumé de la FNPL.
Prairies : une production supérieure de près de 30 % à la moyenne
La production cumulée des prairies permanentes est supérieure de 29 % à la moyenne de référence calculée sur la période 1989-2018 au 20 juillet, d’après une note du ministère de l’Agriculture (indice Isop, simulation). « Les conditions météorologiques restent très favorables à la pousse de l’herbe avec des pluies fréquentes et l’absence de fortes chaleurs sur la quasi-totalité du pays, souligne la publication. Pour un quart des prairies permanentes, la pousse cumulée au 20 juillet atteint déjà le niveau normal de fin de campagne ». Seules les prairies du sud-est de l’Occitanie sont déficitaires. Le Grand-Est, les Pays de la Loire et le Centre-Val de Loire sont les régions où l’excédent est le plus fort. Cependant, la forte pousse de l’herbe n’annonce pas une bonne année fourragère. En effet, la récolte des foins a été perturbée par les pluies abondantes. « Les quantités récoltées sont satisfaisantes mais la qualité est médiocre : bien souvent l’herbe était bien trop avancée en stade faute d’avoir pu intervenir plus tôt à cause de la persistance de la pluie ce printemps », relève la note « agro-climatique et prairies » de l’Institut de l’élevage (Idele).
JG – Agrapresse