Aveyron | Par Bérangère Carel
Kévin Gavalda est producteur de lait de brebis, pour la filière Roquefort, à Martrin. Administrateur à JA Aveyron, le jeune éleveur partage sa vision du métier et ses attentes pour demain.
«Je me suis installé en 2021 au sein d’un GAEC familial dont je suis la plus jeune génération. J’ai toujours voulu être agriculteur. Malgré les réticences de mes parents, qui souhaitaient que j’ai une expérience en dehors du milieu agricole, j’ai passé un Bac Pro à La Cazotte en 2012. Je suis entré dans la vie professionnelle, tout d’abord en tant que commercial, puis rapidement comme salarié sur des exploitations agricoles. Ce qui m’a le plus marqué de cette époque, ce sont les missions réalisées chez des personnes seules, qui ne pouvaient plus s’en sortir, souvent à cause de problèmes de santé. Ces expériences m’ont particulièrement sensibilisé à la problématique de la main-d’œuvre et de la transmission des exploitations, qu’il faut anticiper avant d’être dans l’incapacité de continuer.

Avoir du temps pour soi, une priorité
Neuf ans après mon diplôme, et fort de la diversité des exploitations et des productions rencontrées en tant que salarié, j’ai rejoint la ferme familiale, gérée par deux couples : mon père et sa compagne, mon oncle et ma tante. Ils avaient déjà instauré une organisation du travail permettant de profiter de week-end, à raison d’un sur deux, et de trois semaines de congés par an. Mon arrivée a permis de dégager encore plus de temps libre. En effet, un de mes projets à l’installation : ne pas perdre sa santé au travail ! J’en ai trop vu lorsque j’étais salarié. Aujourd’hui nous travaillons un week-end sur trois et on s’octroie une journée par semaine. C’est important pour moi qui suis aussi papa. En période chargée on essaie a minima de conserver ces week-end.
Lors de mon installation, j’ai réussi à impulser quelques changements, pas toujours faciles car le conflit de génération reste une réalité. Tout d’abord, j’ai fait entrer des salariés sur l’exploitation, dont un jeune de 16 ans. Il y a découvert le métier et est aujourd’hui à 18 ans toujours salarié agricole. Faire accepter un «étranger» dans cette ferme familiale n’est pas anodin. C’est une manière de préparer le renouvellement de mes associés. Ensuite, en me basant sur les acquis que j’ai collectés sur d’autres fermes, j’ai pu faire admettre des modifications d’assolement, afin de diminuer les intrants, ou encore un agrandissement de la bergerie pour améliorer le bien-être animal. Pari réussi ! Les résultats techniques et économiques de ces modifications m’ont donné raison.
«Le conflit de génération, une réalité»
Mon avenir, je le conçois avec une vie sociale à côté de l’exploitation. Pour cela, il me faudra installer, sans doute hors cadre familial. Mon engagement au sein de JA découle de ce constat et des difficultés de transmission dont j’ai été le témoin. Nous devons trouver des solutions pour lever des freins encore trop nombreux. Nombreux chez les cédants, qui se réveillent parfois trop tard et qui ont encore trop d’a priori sur des repreneurs non issus du milieu agricole. Il faut mettre en avant les expériences positives, montrer que ça peut fonctionner si on s’en donne les moyens.
Nous devons montrer aux jeunes qu’agriculteur n’est pas forcément un métier fait de sacrifices. Pour les attirer, il faut mettre en avant qu’il existe des solutions pour se dégager du temps. Je suis persuadé que le renouvellement est là. Des jeunes motivés par le métier, il y en a, allons les chercher plutôt que les décourager. Nous devons créer des liens entre eux et la génération de cédants, impulser de la fluidité dans les rapports. En tant que producteur de Roquefort, je suis confiant dans la solidité de ma filière, qui procure et procurera demain de nombreuses opportunités d’installation».
Bérangère Carel
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