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Outre les discussions autour de la HVE, syndicats, ministère de l’Agriculture et Commission européenne discutent encore âprement des modalités d’applications des conditions de la BCAE 6 (couverture des sols) et 7 (rotation des cultures). Il serait bien acquis que l’obligation de couverture des sols (BCAE 6) s’appliquera sur tout le territoire, et non seulement en zones vulnérables au titre de la directive Nitrates. Le ministère serait parti sur l’idée de définir une période post-moisson de quelques mois (dont la durée reste à définir) durant laquelle l’agriculteur devrait couvrir ses sols un certain nombre de semaines (à préciser également). Les débats portent notamment sur la date à laquelle terminer la période réglementée, en particulier sur l’opportunité de la faire courir jusqu’au mois de novembre inclus. En outre, la décision pourrait être en partie territorialisée, prise par l’administration déconcentrée à l’échelle régionale ou départementale. Sur la BCAE 7 (rotation des cultures), un «bras de fer» se poursuit entre Bruxelles et Paris, qui souhaiterait conserver le principe de la «diversification» (diversité de cultures à un temps « T » à l’échelle de l’exploitation), notamment pour ne pas affecter les productions de maïs semence. Quelle qu’en soit l’issue, l’idée de n’appliquer cette conditionnalité que sur une partie de l’exploitation est sur la table, d’après les syndicats.

Didier Bouville

Comme prévu par la France dans la première version de son projet de plan stratégique national (PSN), la déclinaison nationale de la future Pac, la HVE – 3e niveau de la certification environnementale – devrait bien rendre les agriculteurs éligibles au niveau de paiement supérieur (environ 80 €/ha) des éco-régimes, rapportent les syndicats agricoles. Quant au niveau 2+ de la certification, il permettrait toujours d’accéder au niveau standard (environ 60 €/ha). Les dernières discussions sur l’éco-régime portent sur le montant et l’architecture du paiement réservé à la bio, qui sera bien supérieur à la HVE conformément aux souhaits de la Commission européenne, alors que les deux labels donnaient accès au même niveau d’éco-régime dans le projet initial de Paris. Le complément dont bénéficierait la bio varie entre +10 €/ha et +60 €/ha, selon les propositions des syndicats. Concernant l’architecture, plusieurs options seraient sur la table: une troisième voie d’éco-régime bio, un troisième niveau bio à la voie de certification, ou un bonus (top-up) aux voies existantes (certification, pratiques, infrastructures). Depuis quelques semaines, le ministère de l’Agriculture discute en parallèle avec les parties prenantes et la Commission européenne, pour répondre aux observations de Bruxelles sur la première version de son PSN. Un arbitrage est attendu en début de semaine prochaine, probablement en Conseil supérieur d’orientation (CSO).

Didier Bouville

Les partenaires sociaux se sont mis d’accord, le 15 juin, pour augmenter de 2,45 à 2,65% les salaires minimaux de la branche production agricole et CUMA, d’après les informations de la FNSEA. La nouvelle grille a été publiée par l’association spécialiste Légumes de France dans sa dernière lettre hebdomadaire. Cette négociation intervient après que le SMIC est passé à 10,85€, soit une augmentation de 2,65%, au 1er mai 2022. Il s’agit de la troisième augmentation depuis l’automne des salaires minimaux de la branche production agricole et CUMA : +2,2 à +2,5% en octobre et 0,9 à 1% en janvier. La délégation patronale a «tenu à garder une grille de salaires attractive tout en prenant en considération les difficultés économiques des entreprises agricoles», explique la FNSEA. L’application légale de ces nouveaux minimums est suspendue à la parution d’un arrêté d’extension de l’accord au Journal officiel, mais «dans le contexte de tension sur le pouvoir d’achat, la FNSEA invite les employeurs à appliquer dès à présent cette nouvelle grille de salaires», indique le syndicat.

Eva DZ

Les membres de l’OMC sont parvenus dans la nuit du 16 au 17 juin à l’issue de leur 12e conférence ministérielle, à un accord sur un paquet de mesures concernant l’agriculture, la pêche et la levée temporaire des brevets sur les vaccins anti-Covid. Obtenu après une prolongation des discussions de 36 heures, ce résultat a été qualifié de «sans précédent» par Ngozi Okonjo-Iweala, la directrice générale de l’OMC. «Il y a longtemps que l’OMC n’avait pas obtenu un nombre aussi important de résultats multilatéraux», a-t-elle commenté. Parmi les textes adoptés dans ce paquet : une déclaration ministérielle, sans portée contraignante, sur la sécurité alimentaire qui souligne l’importance de ne pas imposer de prohibitions ou de restrictions à l’exportation face à la flambée des cours des matières premières agricoles. Un second texte, contraignant lui, protège les achats de nourriture du Programme alimentaire mondial (PAM) de restrictions à l’exportation. Pour rassurer l’Inde, qui a longtemps bloqué son adoption, la décision précise que cela n’empêchera pas l’adoption par tout membre de mesures visant à assurer sa sécurité alimentaire intérieure conformément aux règles de l’OMC. Enfin, des programmes de travail, en vue de la prochaine conférence ministérielle qui devrait se tenir fin 2023, ont été adoptés sur les mesures sanitaires et phytosanitaires et sur la réforme de l’OMC (notamment pour débloquer l’organe de règlement des différends).

Eva DZ

Quatre députés sortants de la majorité présidentielle et bons connaisseurs des dossiers agricoles ont échoué au second tour des législatives, ce 19 juin. Il s’agit de Jean-Baptiste Moreau, Grégory Besson-Moreau, Jean-Bernard Sempastous et Loïc Dombreval. Ils effectuaient tous les quatre leur premier mandat, trois d’entre eux avaient été investis de rôles importants dans l’examen des trois principaux textes «agricoles» de la précédente mandature. Rapporteur de la loi Egalim, Jean-Baptiste Moreau échoue de peu dans la Creuse (48,56%) face à un candidat Nupes. Tout comme l’auteur de la loi foncière éponyme, Jean-Bernard Sempastous (49,87%). Quant à l’auteur de la proposition de loi Egalim 2, Grégory Besson-Moreau, il est plus sèchement vaincu (46,11%) dans l’Aube par le Rassemblement national. Même sort pour Loïc Dombreval dans les Alpes Maritimes (45,34%). Deux autres députés «agricoles» de la majorité ont connu un meilleur sort, reconduits pour un second mandat: Sandrine Le Feur (54,4%, Finistère), Richard Ramos (59,72%, Loiret). Loïc Prudhomme rempile également en Gironde pour la Nupes (57,11%). L’ensemble des députés «agricoles» historiques (ex. André Chassaigne, Thierry Benoit, Marc Le Fur…) sont réélus. Sans surprise, le ministre de l’agriculture Marc Fesneau est aussi reconduit (56,47%) dans le Loir-et-Cher. En revanche, la ministre de la transition écologique Amélie de Montchalin est battue (46,3%) en Essone, tout comme l’ancienne secrétaire d’Etat à la biodiversité Bérengère Abba en Haute-Marne (48,75%).

Eva DZ

La fédération des producteurs de fruits (FNPF, FNSEA) et l’association nationale pommes poires (ANPP) alertent sur un risque de déséquilibre du marché des fruits et légumes, dans un communiqué du 15 juin. Les deux organisations s’inquiètent d’une proposition de règlement de la Commission européenne, qui vise à augmenter les importations exemptées de droits de douane de certains fruits et légumes (pommes, prunes, cerises, raisin de table, jus de raisin, tomates, ail) provenant de Moldavie, ce pays ne pouvant plus exporter ses produits via le territoire ukrainien à cause de la guerre. La mesure envisagée durerait un an, selon le projet de texte européen. Pour la FNPF et l’ANPP, le texte menace en particulier le marché européen de la pomme «tout juste à l’équilibre». Les deux organisations appellent le ministère de l’Agriculture et l’exécutif européen «à une surveillance étroite des marchés, et à un respect strict du caractère provisoire de cette mesure». Elles appellent également à afficher l’origine des fruits sur les produits transformés.

Didier Bouville

«Un plan de développement de l’agriculture et de l’alimentation biologique doit être mis en œuvre afin d’enclencher la transition agricole, sociale et alimentaire»: avec leur «appel de Bordeaux» publié le 16 juin, l’ensemble des structures membres d’Ifoam France (Fnab, Itab, Synabio), ainsi que les organisations de la Maison de la bio (Natexbio, Synadis, Forébio), espèrent encourager le gouvernement français à publier un nouveau plan bio national. «Il pourra nourrir le plan bio européen et aider à sa déclinaison ambitieuse», précise le texte. Une mobilisation collective intervenant alors que le plan Ambition bio 2022 arrive à son terme, et que le plan bio européen encourage les États membres à rédiger des feuilles de routes nationales. «Le gouvernement n’a encore jamais mentionné un tel plan, et rien ne garantit pour l’heure qu’il sera mis en place», prévient Jaques Caplat, président d’Ifoam France. Cette déclaration, poursuit-il, illustre une convergence nouvelle de l’ensemble des acteurs du secteur bio. «Il a pu y avoir autrefois des divergences entre les acteurs de l’amont et de l’aval dans la bio. Mais l’urgence fait que tout le monde maintenant a conscience qu’il faut renforcer les fondamentaux et les exigences de la bio pour qu’elle se développe», estime Jacques Caplat.

Didier Bouville

La start-up française HappyVore a finalisé le 13 juin une levée de fonds de 35 M€, qui financera la mise en route «de la plus grande usine de production» de simili-viande en France, selon elle. «Les autres sites sont en République tchèque pour Nestlé, ou aux Pays-Bas pour Beyond Meat. Il n’y a aucun autre site dédié au végétal aussi grand en France, avec une capacité de 10 000 t/an», a précisé à l’AFP Guillaume Dubois, son cofondateur. La start-up a racheté il y a six mois un site agroalimentaire de 19 000 mètres carrés «en friche» à Chevilly (Loiret), et vise une mise en route de son usine début 2023. Le principal investisseur est Artal, une société européenne qui investit «sur les conseils» du fonds d’investissement Invus, «pour la plus grande partie» de la somme levée, a expliqué Guillaume Dubois. HappyVore a aussi reçu le soutien de la Bpifrance, du cofondateur de Sushi Shop, Adrien de Schompré, ou encore de Philippe Canter, l’ancien directeur d’Innocent France.

Didier Bouville

«Je vais essayer de convaincre le reste de la Commission européenne de la nécessité de prolonger, une nouvelle fois en 2023, la dérogation accordée cette année permettant de mettre en production les jachères» pour faire face au défi de sécurité alimentaire posé par l’invasion russe en Ukraine, a promis le commissaire européen Janusz Wojciechowski, le 13 juin, à l’issue de la réunion des ministres de l’Agriculture de l’UE à Luxembourg. Cette demande est portée par une quinzaine d’Etats membres. En 2022, cette dérogation aux règles sur la rotation des cultures et les terres non productives a été accordée en urgence au mois de mars n’a pas donc pas pleinement pu être déployée. «Nous avions estimé qu’il était possible de mobiliser 4 millions d’hectares de jachères, ce sera sûrement moins», a indiqué Janusz Wojciechowski. «Il est nécessaire d’avoir une décision prise suffisamment en amont pour l’année prochaine», a confirmé le ministre français Marc Fesneau qui présidait son dernier Conseil Agriculture avant de passer la main à la République tchèque le 1er juillet.

Didier Bouville

Alors que la Commission européenne leur présentait les conclusions de son rapport sur la possibilité d’appliquer, «au cas par cas» et dans le respect des règles de l’OMC, des clauses miroirs sur les normes sanitaires et environnementales de l’UE, les ministres de l’Agriculture des Vingt-sept se sont une nouvelle fois montrés divisés sur le sujet lors de leur réunion du 13 juin à Luxembourg. D’un côté, une partie d’entre eux (Espagne, Autriche, Hongrie, Irlande) se range derrière la présidence française du Conseil, qui plaide pour que soient imposées des mesures miroirs. De l’autre, de nombreux pays (Suède, Pays-Bas, Danemark, Finlande, Pologne, Allemagne) se montrent beaucoup plus prudents et souhaitent favoriser les négociations au niveau multilatéral (OMC par exemple) ou bilatéral (inclusion de clauses spécifiques dans les accords de libre-échange). Les Vingt-sept sont néanmoins d’accord sur les principaux domaines dans lesquelles l’UE devrait agir pour mettre en cohérence ses objectifs avec sa politique commerciale: le bien-être animal (une révision de la législation est attendue fin 2023), la lutte contre l’antibiorésistance, les produits phytosanitaires (notamment la mise à jour des limites maximales de résidus de pesticides interdits dans l’UE) et, dans une moindre mesure, l’environnement.

Didier Bouville