National | Par eva dz

Congrès de la Fédération nationale porcine : le piège des prix élevés

La Fédération nationale porcine a tenu son congrès annuel à Rouen le 16 juin alors que le marché du porc s’installe dans «une nouvelle ère de prix élevés». C’est dans ce contexte que la filière doit affronter des défis environnementaux et de bien-être animal à venir.

Le rebond du prix du porc est incontestablement le fait marquant de cette année 2023 pour les producteurs de porcs. C’est ce qu’a indiqué François Valy, le président de la Fédération nationale porcine (FNP), en ouverture de congrès. Le prix a dépassé 2,35 euros le kg sur les marchés et il semble bien installé à ce niveau. Ce qui représente une hausse de 25 % en un an. Mais cette tendance inflationniste reflète des bouleversements dans la filière.

Les raisons de cette augmentation : la flambée des cours des céréales qui dépassent les 380 euros la tonne et qui représentent 70 % des coûts de production. Second facteur, la baisse globale de la production en Europe qui réduit l’offre. Cette baisse atteint 7,7 % au premier semestre 2023, notamment en Espagne dont la chute inédite de 9 % semble marquer la fin de la croissance dans ce pays. Troisième paramètre, les politiques publiques européennes qui incitent à une réduction de l’élevage.

En France la baisse des cheptels a été de 4,2 % en 6 mois mais ce rythme semble ralentir. Un ralentissement moins marqué que chez les partenaires européens car le marché français est mature et moins dépendant des échanges commerciaux.

Des conséquences négatives

Elisa Husson économiste à l’Institut du porc (Ifip) a présenté les pièges qui se dissimulent derrière ces prix élevés. Déjà, une consommation qui stagne. Ensuite, sur les marchés internationaux, la viande porcine européenne est chère, donc moins compétitive face à ses concurrents. Les Etats-Unis ont ainsi augmenté d’un tiers leurs exportations vers la Chine, traditionnelle cliente de l’Europe. «L’inquiétude, déclare François Valy, c’est que nous ne sommes plus autosuffisants en production porcine alors que nous dépassions les 100 % en 2022. Au moment où jamais la souveraineté alimentaire n’a été autant évoquée».

On note des arrivées massives de viande de porc en France. L’Espagne, malgré ses difficultés, reste le premier fournisseur et ses ventes de jambons, de poitrine et de longes sur le marché français ont augmenté de 11%.

Selon Elisa Husson, «les prix à la production pourraient se détendre dans les mois qui viennent mais l’offre restera faible en France et en Europe, les prix resteront élevés, ce qui laisse peu d’espoir pour une reprise de la demande».

Thierry Meyer, le président de l’interprofession Inaporc, a rappelé que la situation aurait été bien plus grave sans le premier plan de soutien à la filière porc accordé par les pouvoirs publics après les crises de 2021/2022 liées au Covid et au conflit en Ukraine. L’Etat a ainsi alloué 285 millions d’euros qui ont bénéficié à 4 000 élevages. Sans cette aide la chute de production française aurait été deux fois plus importante.

Nouveaux défis sociétaux

Dans ce contexte économique la filière attend des décisions européennes sur le bien-être animal et notamment les cages maternité-liberté et la castration des porcelets. Elle s’inquiète aussi de la révision de la directive européenne IED sur les émissions industrielles.

Sébastien Windsor, président de Chambres d’agriculture France, lui-même producteur de porcs à côté de Rouen, s’est félicité du combat mené par les Chambres et la FNP pour obtenir le plan de soutien. Il demande un renforcement des liens entre les deux organismes afin que les Chambres puissent mieux orienter des jeunes vers la production porcine. Quant à Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, il a insisté sur la nécessité de revenir à 110 % d’autosuffisance afin de conforter la souveraineté alimentaire du pays. «Il faut vivre de son métier. La compétitivité n’est pas un gros mot, a-t-il déclaré, cela doit se traduire dans le revenu des producteurs et leur capacité d’investissement», soulignant que la rentabilité du capital est de 1 % en agriculture quand elle atteint 5 à 10 % dans l’industrie et 20 % dans le secteur bancaire. Il a fustigé «ce sport national qui consiste à taper sur l’élevage et rappelé l’importance de réhabiliter la place de l’alimentation. Celle-ci a un prix surtout si l’on veut produire en France en respectant des règles».

La rédaction

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L’interprofession s’est fixée pour objectif de préserver l’autosuffisance de la production française à l’horizon 2035. Parmi les moyens : en finir avec l’empilement des normes et faciliter les transmissions et reprises d’élevage.La filière porcine n’est pas épargnée par la perspective d’un décrochage historique. «La décapitalisation en cours est dramatique et reflète un découragement des éleveurs face au mur des contraintes à respecter», a expliqué Philippe Bizien, président de l’interprofession nationale porcine (Inaporc) le 1er février sur fond de crise agricole. «Une situation qui n’est en rien liée à la conjoncture», a souligné l’éleveur breton, l’année 2023 s’étant montrée favorable aux producteurs, avec des prix en hausse d’environ 10 % sur un an. La déprise actuelle est bien liée «à l’impossibilité…