National | Par La rédaction

Une étude Inrae/Ifremer Les produits phytos vus par les scientifiques

L’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) et l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) ont rendu public, le 5 mai, le résultat d’une expertise scientifique. Celle-ci dresse un état des lieux des impacts des produits phytopharmaceutiques sur la biodiversité et les services écosystémiques. S’il reste encore du chemin à parcourir, les deux instituts reconnaissent que des progrès ont été réalisés.

( Crédit image : iStock-Luca Piccini Basile)

Saisis par les ministères de la transition écologique, de l’agriculture et de la recherche, l’Inrae et l’Ifremer ont mis leurs moyens en commun et travaillé pendant deux ans pour dresser l’inventaire de l’impact des produits phytosanitaires sur l’environnement : sols, eaux, biodiversité animale etc. «Les contaminations sont plurielles. Elles concernent tous les produits et tous les milieux», indique Wilfried Sanchez, directeur scientifique adjoint de l’Ifremer qui pointe les concentrations élevées dans les sols agricoles et des pollutions plus diffuses mais existantes «y compris dans les fonds marins». «On retrouve encore du DDT (un pesticide interdit en France en 1971, ndlr) jusqu’à 3 000 mètres de profondeur et au large des îles Kerguelen», souligne-t-il.

Trouver un équilibre

Les chercheurs confirment que l’utilisation des produits phytopharmaceutiques (PPP) qui ont pourtant reçu une autorisation officielle de mise sur le marché, contribuent à faire reculer la biodiversité comme les oiseaux, les pollinisateurs. «Ils peuvent avoir des effets sub-létaux comme la perte d’orientation pendant le vol, quelques déficiences immunitaires, des modifications comportementales comme une plus faible capacité à fuir certains prédateurs», précise Stéphane Pesce, directeur de recherche en écotoxicologie à l’Inrae. «Mais il ne faut pas nier que les PPP permettent aussi de préserver les productions végétales et d’assurer la sécurité alimentaire», rappellent Wilfried Sanchez et Thierry Caquet, directeur scientifique Environnement de l’Inrae. Ce dernier milite d’ailleurs pour «trouver un équilibre entre la protection des cultures et la limitation des effets et des impacts des PPP. Il faut sortir d’une certaine logique de dépendance», explique-t-il citant le plan Ecophyto qui se fixe pour objectif de réduire de 50 % l’apport des PPP sur les cultures d’ici 2025. «C’est possible», martèle-t-il citant l’exemple des fermes-pilotes qui parviennent à réduire leurs intrants, sans perte de ressource et sans perte de revenus.

Réglementation très contraignante

La solution pourrait venir de «nombreux leviers d’action», comme la réduction des quantités à appliquer ou en favorisant le biocontrôle car ce dernier présente «une faible persistance et une faible écotoxicité», avance Laure Mamy, directrice de recherche à l’Inrae. Elle concède toutefois que si le biocontrôle est une «alternative prometteuse», il existe des produits naturels dont la toxicité est égale et supérieure à certains produits chimiques de synthèse. De même, met-elle en avant l’amélioration des formulations et les progrès techniques comme les buses antidérives («qui réduisent la dérive d’au moins 70 %»). Comme Stéphane Pesce, elle prône à demi-mots le retour des haies qui constituent autant de zones refuge pour la biodiversité, qui réduit les effets des PPP et limite leurs transferts. Le niveau réglementaire peut constituer un autre levier d’action. Laure Mamy rappelle que la réglementation européenne en matière de PPP «est l’une des plus exigeante au monde, notamment en terme d’évaluation des impacts de substances sur l’environnement». «Beaucoup plus contraignante que celle des États-Unis par exemple». Enfin, la sélection végétale peut aussi venir au secours de la biodiversité à l’image des cépages résistants au mildiou et à l’oïdium qui permettent de réduire jusqu’à 80 % les applications fongicides.

Christophe Soulard

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