National | Par Didier Bouville

Premier combat des producteurs de lait, faire appliquer la loi Egalim réellement

« Notre premier combat est de faire appliquer la loi Egalim réellement », autrement dit que les coûts de production du lait soient effectivement répercutés, sans avoir à céder dans des bras de fer avec les industriels. Tel est le message fort que les producteurs de lait ont fait passer auprès des pouvoirs publics et de la presse lors de leurs assises les 6 et 7 décembre à Alençon.

« On ne va pas déverser des tonnes de lisier devant les portes des industriels. Par contre nous avons une loi, la loi Egalim, qui dit que les coûts de production de la matière première agricole doivent être payés aux producteurs et nous tenons à ce qu’elle s’applique », a déclaré le président de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL), Thierry Roquefeuil, à l’issue des assises de l’organisation les 6 et 7 décembre à Alençon. « C’est ce que j’avais évoqué au ministre de l’Agriculture la semaine dernière. Dans la loi, il est dit que la matière première agricole n’est pas négociable. Il est prévu, en cas de litige, un médiateur, et une Chambre arbitrale si la médiation n’aboutit pas. Nous ne sommes jamais allés jusque-là pour l’instant ».

« La LME on n’en veut plus »

Il a rappelé que le caractère non négociable de la matière première agricole n’existait pas dans la LME (Loi de modernisation de l’économie, votée en août 2008) et que la loi Egalim a remplacé la LME. « La LME on n’en veut plus. La loi Egalim est là, il faut qu’elle s’applique de façon effective », a souligné le président de la FNPL.

À l’appui de son raisonnement, il a passé la vidéo d’une courte interview de son vice-président, Ghislain de Viron sur BFM TV, qui expliquait : « Nous demandons une revalorisation du prix du lait de 7 % parce que nos charges ont augmenté de 7 % ». Mais, face à cette demande, Lactalis, premier acteur laitier mondial, rétorque que « 7 % c’est beaucoup trop, ce sera donc + 1 % seulement ». « Ce qu’il faut pour rééquilibrer, c’est la loi Egalim, il faut que le législateur mette tout en œuvre pour que les lois soient respectées et que, comme c’est prévu dans la loi, on parte bien du coût de production » pour former le prix, a exposé Ghislain de Viron. Les dirigeants de la FNPL ont voulu particulièrement, lors de ces assises, obtenir que les engagements des pouvoirs publics soient suivis d’effet et « n’engagent pas que ceux qui les écoutent », a lancé Thierry Roquefeuil à la fin de son discours de clôture.

L’emmental avec du lait français, sujet symbolique mais pas anecdotique

Autre dossier, qui tient au cœur des producteurs, celui de l’origine du lait dans la fabrication des fromages. Or, de « l’emmental français » est produit avec du lait en provenance d’un autre pays. « Ce sujet est peut-être symbolique mais il n’est pas anecdotique », a commenté un porte-parole de la FNPL. Cette dernière a pris la décision qu’un logo « produit avec du lait français » sera apposé, dès les prochaines semaines, sur l’emmental quand la matière première est produite en France. Cela pour pallier l’absence d’une réglementation rigoureuse à l’échelon européen, puisque la règlementation européenne garantit l’origine du produit fini mais pas de la matière première. Car pour l’instant quand le consommateur voit à l’étal de « l’emmental râpé français », il s’agit d’emmental qui a été râpé en France, « mais avec du lait qui a peut-être été produit dans un autre pays », a dénoncé Thierry Roquefeuil.

Retournement des prairies : pas de ratio national

Sur l’épineuse question de l’interdiction de retourner des prairies au-delà d’un seuil de 5 %, sujet qui cristallise l’exaspération des éleveurs laitiers, le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, a annoncé une nouvelle qui décrispe quelque peu les tensions : il n’y aura pas de ratio national. Les ratios resteront régionaux. Le président de la FNPL a salué cette nouvelle, mais estime qu’il faudra aller plus loin dans la réflexion sur le retournement des prairies : « On oblige les producteurs de lait à ne pas retourner les prairies au-delà de 5 %, mais à ceux qui arrêtent l’élevage ou l’agriculture tout court pour vendre la prairie à un promoteur immobilier, on leur dit quoi ? Il va falloir s’atteler à ce genre de question », a conclu Thierry Roquefeuil à l’issue des assises d’Alençon.

La rédaction

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