National | Par Didier Bouville

La fin du corridor ne fait pas flamber les cours

L’embargo sur les exportations de céréales ukrainiennes, imposé par la Russie désoriente les marchés des céréales sans les faire paniquer. Mais le Kremlin rend la navigation vers les ports russes très risquée.

Depuis le début de la campagne, le prix de la tonne de blé – autour de 230 € – est inférieur de 100 € à 120 € à son niveau de l’été 2022 alors que venait d’être ouvert le corridor de la Mer Noire sous l’égide des Nations Unies. Pour le maïs, le différentiel de prix est similaire. Un an plus tard, la non-reconduction de ce corridor n’a pas généré de vent de panique. Les cours évoluent au rythme des nouvelles parvenant de Moscou et de Kiev mais aussi selon l’importance des destructions causées par les bombardements des infrastructures portuaires et routières, aussi bien russes qu’ukrainiennes.

Récoltes bradées

« Pour autant, le risque en Mer Noire augmente de jour en jour. Toute menace sur les exportations russes a bien plus d’impacts que sur le corridor d’exportation ukrainien il y a encore quelques semaines », a déclaré Ole Houe, directeur général du courtier et conseiller IKON Commodities. La Russie doit exporter 45 millions de tonnes (Mt) pour écouler sa récolte (84 Mt) et résorber ses stocks de report record (17 Mt). Or la navigation sur la Mer d’Azov devient très risquée depuis que les ponts et les ports russes sont les cibles des drones lancés par l’armée ukrainienne. Les autres pays exportateurs et importateurs de grains s’organisent pour rendre les échanges mondiaux aussi fluides que possible. En Ukraine tout d’abord, les échanges commerciaux se poursuivent en s’affranchissant toujours plus des ports maritimes. Depuis le début du mois de juillet, plus de 2 Mt de blé et de maïs ont été exportées comme l’an passé à pareille époque, selon le site Ukragroconsult. Par ailleurs, le gouvernement ukrainien vient de signer un accord-contrat avec la Croatie pour expédier des céréales depuis les ports du Danube. En fait, l’idée d’acheminer des grains depuis les ports de la Mer Baltique et de la Mer Adriatique, avec le soutien financier de l’Union européenne, fait son chemin. Mais les céréaliers ukrainiens bradent leurs récoltes 110-120 € la tonne !

Situation tendue sur le blé dur

En Chine, les autorités jouent la carte de l’apaisement. « Elles ont décidé d’annuler les droits antidumping et compensateurs sur les importations d’orge australienne à compter du 5 août 2023 », rapporte Ukragroconsult. L’Empire du milieu projette d’en importer 8,4 Mt alors que les pays exportateurs d’orges se comptent sur les doigts d’une main. Mais si elle entreprend l’achat de 20, voire de 30 Mt de blé panifiable, la Chine pourrait alors relancer l’inflation des cours des céréales. En effet, aucun pays exportateur n’est en mesure de répondre à une telle demande même en épuisant ses stocks. De son côté, l’Union européenne sera bien présente pour approvisionner les marchés mondiaux. Les Vingt-sept exporteront 36 Mt de blé en 2023-2024, l’équivalent de la production française (35,6 Mt). Toutes céréales confondues, 276 Mt de grains seraient récoltées, soit 10 Mt de plus que l’an passé grâce au redressement de la production de maïs (63 Mt, +11 Mt sur un an). Mais 127 Mt de blé seront finalement engrangées (+ 1 Mt). En fait, les pays céréaliers composent avec le climat. En Europe du Nord, les précipitations compliquent les moissons. Et faute de pluies suffisantes dans le Corn Belt, la production étasunienne de maïs n’était plus qu’estimée à 373 Mt au mois de juillet dernier (381 Mt en juin 2023). Or une récolte de maïs très abondante participerait à l’équilibre les marchés agricoles. Sur le marché du blé dur, la situation est très tendue. Le grain manque. A La Palice, le prix de la tonne augmenté de plus de 70 € depuis le début du mois de juillet. Le Canada victime de fortes chaleurs n’exportera pas plus de 4,75 Mt de blé dur durant la campagne 2023-2024 alors que la production européenne stagne (7,2 Mt) et la demande des pays importateurs sera très importante (10,1 Mt). A la fin de la campagne, les stocks de report seront réduits à peau de chagrin (1,6 Mt).

La rédaction

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