National | Par Didier Bouville
Alors que la production de lait a ralenti en avril de 0,2 %, les Français ont consommé 18 % de produits laitiers en plus. A l’export, les ventes ont progressé de 4,3 % au premier trimestre.
Pendant les deux mois de confinement de l’économie française, tout le lait produit en France a été collecté. Alors qu’aux Etats-Unis et au Royaume uni, notamment, des éleveurs ont dû jeter une partie de leur production, générant d’importantes pertes de chiffre d’affaires et de revenus.
Dans l’Hexagone, les 1 000 litres de lait conventionnel ont été payés 353 € en moyenne au cours du premier trimestre, soit 2 % de plus qu’un an auparavant. Des baisses de 20 à 30 €/1 000 l au 2ème trimestre 2020 par rapport au 1er trimestre sont à prévoir. Mais elles seront dans l’ensemble davantage liées à des facteurs saisonniers qu’à la crise sanitaire du Covid-19. La croissance de la production laitière s’est progressivement ralentie tout au long du premier trimestre. En avril, elle a même diminué de 0,2 % car les conditions météorologiques ont été moins favorables à la pousse de l’herbe qu’en mars.
Impact réduit
Mais le retour des précipitations a favorisé de nouveau la croissance de l’herbe. Aussi, la production de lait pourrait se redresser au mois de mai. Toutefois, la collecte augmentera modérément car les effectifs de vaches sont inférieurs depuis plusieurs mois à ceux de l’année passée (– 1,8 % en avril 2020 par rapport à 2019 par exemple). Dans le sud-ouest, la baisse est très forte (-5 % en un an) mais elle reste limitée dans le grand-ouest.
De moins en moins de génisses entrent en production par rapport à l’an passé (- 2 % sur un an) alors que le nombre de réformes a augmenté (+ 9 %). Aussi, les mesures prises par la Commission européenne pour réduire la production de lait ont peu d’impacts puisque le repli était déjà engagé. Pour sa part, le groupe Lactalis n’a pas incité les éleveurs à produire moins et il n’a pas baissé son prix de référence, selon l’Idele. Mais des coopératives pourraient diminuer leur prix de printemps et bonifier celui en vigueur l’été prochain.
Les AOP affectées
En fait, les Français confinés ont consommé plus de produits laitiers. Du 16 mars au 3 mai, les achats de produits laitiers ont progressé de 18 % par rapport à l’an passé à la même époque (+ 31 % pour le beurre, + 23 % pour le lait liquide). La filière laitière n’a quasiment pas été affectée par l’arrêt de l’activité de la restauration hors domicile. Seules les zones AOP du Massif Central et dans les Alpes (-30 % de livraisons pour la zone Saint Nectaire, -20 % dans les zones de production d’Abondance ou de Reblochon par exemple) ont été affectées par le confinement de l’économie française en raison de la perte des débouchés spécifiques (services à la coupe notamment).
Par ailleurs, les exportations de produits laitiers n’ont pas été impactées. Contre toute attente, elles ont progressé aussi bien en volume (+ 25 % pour la poudre de lait par exemple) qu’en valeur (+ 4,3 % sur un an) au cours du premier trimestre 2020. Si bien qu’elles ont atteint 1,8 milliard d’euros.
Production en repli en Europe, en hausse aux Etats-Unis
Après avoir globalement progressé depuis l’automne 2019, la collecte de lait pourrait ralentir et même fléchir dans l’Union européenne au cours du deuxième trimestre 2020. Un quart des pays membres produit déjà moins de lait (Danemark, Lettonie, Lituanie, Suède, Roumanie) depuis le début de l’année. En Allemagne, le prix payé aux éleveurs a commencé à baisser en février dernier (315 €/ 1000 l, en recul de 3 €/ 1 000 l) alors qu’il est plus faible qu’en France. Aux Etats-Unis, la production de lait est portée par des effectifs de vaches en hausse (+ 47 000 têtes début mars 2020 (+0,5% /2019). Le prix du lait a diminué de 59 dollars en trois mois alors que les coûts alimentaires ont augmenté, réduisant de plus de 60 $ la marge sur coût alimentaire.
éleveurs+lait+AOP