Aveyron | Par Elisa Llop
En l’espace de quelques semaines, le secteur de Golinhac, dans la vallée du Lot, dénombre pas moins de 4 attaques dont avec 1 avec vautours et 2 qualifiées officiellement «Loup Non Ecarté». Un événement inédit concernant ce prédateur, dans cette localisation de l’Aveyron. Mardi 3 juin, les deux éleveurs dont le troupeau a été touché, ainsi qu’une trentaine d’agriculteurs, se sont mobilisés devant la préfecture de Rodez. Une pression de la FDSEA et JA pour autoriser sans délai des tirs de défense simple contre les loups.

Deux fois. C’est le nombre, en l’espace de quelques semaines, où Christophe Pages, du Gaec de l’Aubiera, a dû faire face, la peur au ventre, aux cadavres de deux de ses veaux, dévorés, gisant dans ses prés. Deux attaques attribuées au loup. La première le 22 avril et l’autre dimanche 1er juin.
«Dans les deux cas, j’ai découvert le massacre au petit matin ; mes vaches étaient stressées, elles avaient un comportement inhabituel. J’ai commencé à inspecter la prairie, et c’est là que j’ai découvert les carcasses des veaux», raconte l’éleveur. Dans le premier cas, il s’agissait d’un veau de 6 semaines, et d’un jour pour le second, dont la carcasse a été déposé ce mardi devant la préfecture. Les deux veaux ont été pris à la jugulaire (le mode d’attaque des loups) puis partiellement dévorés, sur toute la zone du cou, mais aussi de la cuisse pour l’un.
«Au début, je n’en ai pas parlé ; déjà, nous n’étions pas complètement certains du prédateur ; et puis, j’avais peur qu’on me prenne pour un fou. Un loup dans ce secteur, c’est quasiment du jamais vu. Une seule attaque de loup sur des brebis avait été recensée auparavant sur la commune, en mars 2022. Les attaques se sont passées à 20 m à peine de la maison de mes parents, dont le chien avait aboyé ces deux nuits-là avant que le jour se lève», témoigne l’éleveur, qui possède un cheptel d’environ 90 vaches Aubrac. Sentiment partagé par certains témoins, ils seraient une dizaine à avoir observé l’animal dans le périmètre.
«C’est simple, depuis dimanche, je ne dors plus. Mes vaches et moi, nous sommes toujours traumatisés. Lors de la 1ère attaque, 1 km de clôture a été arraché par mes vaches, paniquées. J’ai réparé et augmenté le voltage, mais je crains que ça ne change rien. Depuis, elles sont toujours sur le qui-vive, elles ont même failli m’attaquer, alors qu’elles sont paisibles d’habitude. Pour cette saison, deux vaches doivent encore vêler. ça veut dire que je ne dois plus sortir mes bêtes du tout ? Ça ne correspond pas à la manière dont j’élève mes animaux, tant en éthique que niveau pratique. Tout ceci n’est pas normal», s’exclame l’éleveur, dont l’émotion transparaît. «Pour le premier veau, j’ai touché une indemnisation de 839 euros, pour un animal qui aurait pu rapporter 2000 euros» dit-il.
«Je tiens à souligner la réactivité et l’efficacité de l’OFB et de la DDT qui ont fait du bon travail et ont constaté immédiatement la piste du loup. Maintenant, il faudrait que le ministère fasse de même», conclut l’éleveur.
Loup et vautours
Sur la même commune, Serge Viguier, qui élève une soixantaine de Limousines, a vu lui, son troupeau prédaté respectivement par le loup et les vautours, par deux fois, en l’espace de 2 semaines.
L’attaque, attribuée au loup, s’est déroulée dans la nuit de mardi 27 à mercredi 28 mai. Un veau de 3 semaines, retrouvé complètement dévoré du cou jusqu’à l’épaule, «Os y compris ; il manque au moins 5 kg à la carcasse. A cette date, j’attends les retours de l’OFB, pour la confirmation de l’identité du prédateur» explique l’éleveur. Une dizaine de jours avant, son troupeau a aussi été la cible d’une vingtaine de vautours, en pleine journée. Une première aussi pour cet éleveur. Avec une issue heureuse, néanmoins. «Ce jour-là, les vautours se sont attaqués à un veau né à peine 5h auparavant. Sa mère le défendait sans faiblir. Un promeneur a assisté à la scène et a réussi à mettre les vautours en fuite, puis j’ai été prévenu».
Des autorisations souhaitées sans délai
L’éleveur, ainsi que des représentants de la FDSEA et des JA, se sont entretenus avec les services de l’Etat à la préfecture. Ils ont ainsi demandé «que les tirs de défense simple puissent reprendre sans délai, seul moyen légal pour protéger les troupeaux». La direction de la DDT a promis d’en informer le ministère. Actuellement, la mesure devant autoriser sur dérogation l’autorisation de tirs de défense simple est encore en consultation publique jusqu’au 10 juin et devait aboutir initialement au cours de cet été.
De leurs côtés, FDSEA et JA Aveyron ont fait remonter à leurs réseaux nationaux et ont aussi averti les députés pour espérer des mesures immédiates.
Elisa Llop