Aveyron | Par La rédaction
Sur les travers du Fel, plein nord, Pierre Albespy fait pousser des sapins de Noël comme son père et son oncle avant lui. Depuis une dizaine d’années il en a fait une activité qui se complète parfaitement avec son autre métier, vigneron sur l’appellation Entraygues-Le Fel.
A flanc de coteaux, Pierre Albespy a planté des sapins Nordmann, sur une parcelle d’1 ha découpée en 5 lots permettant ainsi une rotation de plantation pour assurer une récolte chaque année.
Quoi de mieux que de livrer des sapins de Noël ou bien d’accueillir sur sa parcelle des familles, pour choisir l’arbre qu’elles décoreront ensemble pour les fêtes de Noël ?! Il y a 10 ans, Pierre Albespy commercialisait ses premiers sapins de Noël. «C’est une activité un peu historique dans la famille, pendant une bonne trentaine d’années, mon oncle puis mon père plantaient des épicéas qu’ils expédiaient par camion-semis pour des marchés de gros. Une culture qui permet d’entretenir et de valoriser nos parcelles en pentes sur les coteaux du Fel», raconte Pierre, devenu vigneron à temps complet depuis quelques années. «Le plant de sapins de Noël et leur commercialisation constituent un bon complément à mon activité de vigneron puisque les périodes de travail s’échelonnent bien dans l’année».
Le choix du Nordmann
Pierre a délaissé les épicéas et a choisi de planter des sapins de variété Nordmann plus à son goût, qui poussent moins vite que l’épicéa mais qui perdent moins leurs épines. «Pour bien organiser mon activité, je plante des sapins chaque année et je fais des rotations sur mes parcelles dédiées à cette plantation, ce qui me permet d’avoir des sapins disponibles chaque année. Il faut bien penser à planter chaque année !», sourit Pierre, qui dédie 1 ha à la plantation de sapins, séparé en 5 lots. Il s’approvisionne chez un pépiniériste de la Creuse, les Pépinières du Haut Limousin, qui travaillait déjà avec son père : «J’achète des plants chaque année chez eux, nous avons d’ailleurs noué une bonne relation puisque le propriétaire est un amateur de vin !», confie Pierre. Chaque année, différentes tailles de sapins sont disponibles pour satisfaire la demande : de 1m à 2m, la taille moyenne et la plus appréciée étant 1m60, atteinte en 7 ans. «Chaque année, le Nordmann monte d’une couronne, on compte donc son âge en fonction du nombre de couronnes». Les sapins sont étiquetés selon leur taille : jaune pour les sapins d’1m80 à 2m, rouge pour ceux d’1,50m et bleu pour ceux de 1m, ce qui facilite la coupe dans la parcelle en fonction des commandes. Puis ils sont livrés sans racine, et sous filet grâce à une machine fabriquée par Pierre, une sorte de grand entonnoir.
«Le plus gros du travail est l’entretien des sapins car le Nordmann a besoin d’être bien nettoyé au pied pour bien pousser !», explique Pierre. Les sapins sont plantés au printemps, en rang espacés d’un mètre : «il faut faire attention au démarrage quand on passe la débroussailleuse dans les rangs afin de ne pas abîmer les sapins car dès qu’on touche son écorce, les épines du Nordmann deviennent toute rouges et l’arbre n’est plus commercialisable !», précise Pierre. Et l’entretien du pied, c’est à la main, à la faucille : «C’est un peu fastidieux surtout les années où il y a beaucoup d’herbe !». Pierre coupe un sapin sur 2 pour leur permettre de s’étoffer d’une année sur l’autre et pour faciliter l’entretien. «Les Nordmann poussent plutôt facilement sur nos pentes mais attention, il ne faut pas que ça penche trop sinon ils poussent de travers ce qui n’est pas très joli ! Il faut qu’ils soient installés au nord puisqu’au sud, ça ne pousse pas au Fel ! Ce qui m’arrange puisque les terrasses au sud sont réservées à la vigne ! Et sur des terres avec du fond pour prendre racine. Personnellement je n’apporte aucun traitement, le sol chez nous est plutôt riche et si je mettais de l’engrais, il y aurait une trop grosse pousse, le sapin monterait haut et ne s’étofferait pas ! J’apporte juste un peu de chaux pour corriger le taux d’acidité et c’est tout !», détaille le producteur. «On pourrait dire qu’on fait du sapin Bio !».
L’une des difficultés de Pierre, ce sont les chevreuils qui viennent abîmer les sapins : «Il faut bien clôturer les parcelles, ça limite les dégâts même s’ils arrivent encore à passer ! Les chevreuils sont très friands des pointes des sapins bien tendres et si elles sont mangées, l’arbre ne pousse plus !», souligne Pierre qui enregistre en moyenne chaque année un peu de pertes sur les sapins.
Un réseau de clientèle très local
Sa clientèle, il l’a constituée via les associations de parents d’élèves locales, notamment dans le Cantal tout proche. «Mes enfants sont scolarisés à Montsalvy, nous avons démarré de là puis avec les APE autour. Ça me permet de prévoir les commandes dès la fin des vacances de Toussaint ce qui permet d’avoir de la visibilité sur les coupes d’arbres et sur les ventes, de faire des livraisons groupées et pour les associations, de retirer un petit bénéfice pour les projets des enfants», avance Pierre, qui fournit aussi quelques communes pour leurs décorations. «Le week-end je reçois aussi à l’occasion des familles sur la parcelle, pour venir choisir leur sapin, c’est un moment sympa !». Pierre commercialise autour de 500 sapins entre fin novembre et mi-décembre et n’a jamais eu besoin de passer une annonce ! «Il y a une vraie demande. Je pense que les gens apprécient de pouvoir choisir un sapin qui a poussé près de chez eux», souligne Pierre qui prévoit d’augmenter un peu ses plantations dans les années à venir, pour conforter cette activité. «Maintenant que je suis vigneron à temps plein, je peux mieux m’organiser pour entretenir mes parcelles de sapins. Les deux cultures se complètent bien dans l’année».
Heureux de cette diversification, Pierre estime qu’il y a de la place pour cette activité : «Je suis content d’avoir développé cette production qui répond à une demande et qui permet d’entretenir nos coteaux voués sinon aux ronces. On coupe et on replante chaque année, c’est un système plutôt vertueux», estime Pierre.
Une production qui donne donc le sourire avec quelques anecdotes en plus : «J’ai des clients qui accrochent leur sapin au plafond ! D’autres qui les installent tête à l’envers ! Il en faut pour tous les goûts !», conclut Pierre… avant d’aller chercher le sapin qu’il installera chez lui avec ses enfants !
Eva DZ
sapins+Noël+diversification+Le Fel