National | Par Didier Bouville

Un paysan d’Occitanie raconte… de Jean-Claude Sabin

Acteur incontournable des profondes mutations que l’agriculture a connues dans la deuxième moitié du XXe siècle, Jean-Claude Sabin a décidé de prendre la plume pour raconter sa vie et son engagement professionnel.

Une vie au service d’une ambition agricole

L’histoire commence par sa naissance en 1934, un jour d’hiver à Aussac près d’Albi dans le Tarn. Il y décrit sa petite enfance heureuse mais rude, son entourage familial, la vie rythmée par les saisons à une époque où la plupart des travaux n’étaient pas mécanisés.

Reçu premier du canton au certificat d’études, il sera agriculteur. Premiers conflits avec son père resté traditionnel. A l’époque, Jean-Claude perçoit déjà l’arrivée du progrès technique dans les fermes qu’il souhaite mettre en œuvre et dont il pressent qu’il va révolutionner les campagnes. « On n’apprenait pas l’agriculture dans les écoles mais dans les fermes et les théories étaient inutiles », observe-t-il. Aujourd’hui, il déplore le refus des avancées scientifiques en agriculture par un certain nombre d’idéologues et obscurantistes. Il dénonce aussi la perte de bon sens de certains mouvements dont les positions médiatisées par la presse et les réseaux sociaux font l’opinion publique sur laquelle s’appuient les politiques pour décider.

Après son service militaire, il revient sur l’exploitation familiale. C’est à ce moment-là qu’il s’engage au CDJA du Tarn. A l’occasion d’un stage de formation en région parisienne, il rencontre Michel Debatisse et sa garde rapprochée. Il ne les quittera plus. Entre temps il s’est installé sur deux petites exploitations proches de la ferme parentale grâce à la Safer qui vient d’être créée. Peu de temps après, il s’associera avec un voisin sur une structure un peu plus grande. Avec leurs épouses ils formeront un Gaec à quatre.

Un engagement syndical

Chargé de structurer le syndicalisme jeune dans le Sud-Ouest, il fait la connaissance d’un autre Tarnais, Raoul Serieys, qui disparaîtra prématurément dans un accident de voiture en Algérie en 1981. « Un personnage hors du commun, un grand leader », se souvient-il. C’est avec lui qu’il conquiert à la hussarde la présidence de la FDSEA du Tarn. Il a 29 ans.

Très vite, il accède au bureau de la FNSEA comme représentant du Sud-Ouest où il sera chargé de l’action syndicale et des relations parlementaires. L’occasion de nourrir quelques réflexions sur la stratégie syndicale, les difficultés à arrêter une manifestation avant qu’elle ne dégénère, le respect du suffrage universel dans les relations avec les pouvoirs publics, la violence qui n’amène à rien…

Un évènement d’importance va déterminer son avenir professionnel, mais il ne le sait pas encore : l’embargo américain sur le soja en 1973. Lui qui avait déjà dénoncé cette excessive dépendance de la France et de l’Europe vis-à-vis du continent américain est chargé de piloter le plan protéines initié par les pouvoirs publics. Ainsi, il sera à l’origine de la structuration de la filière oléoprotéagineuse, la création de la Fédération des oléoprotéagineux (Fop) et celles des interprofessions protéagineuse (Unip) et oléagineuse (Onidol).

Des rencontres et des voyages

Suivra la naissance de Sofiprotéol, l’organisme financier de la filière sur le modèle d’Unigrains. Ainsi commence l’aventure du diester, l’incorporation d’huiles végétales dans les carburants pour trouver de nouveaux débouchés aux huiles alimentaires devenues excédentaires, Avec l’achat de Lesieur, toute la filière oléagineuse, de la graine à l’huile en passant par les outils de transformation, est aujourd’hui contrôlée par les producteurs.

Parallèlement à son engagement dans les oléoprotéagineux, Jean-Claude Sabin sera l’une des chevilles ouvrières de la structuration des coopératives dans le Sud de la France, d’abord le regroupement des coopératives du Tarn dans la Coopérative occitane, puis sa fusion avec la Coopérative agricole lauragaise dans l’Aude pour donner naissance à Arterris. Même démarche au niveau national avec la création d’InVivo. Sans parler de son engagement dans les Chambres d’agriculture dans le Tarn, en Midi-Pyrénées et au niveau national où il aura la responsabilité des relations internationales.

Au-delà des réalisations de l’auteur qui ont marqué cette période, l’ouvrage fourmille d’anecdotes souvent drôles issues de ses nombreuses rencontres et voyages à travers le monde qui rendent la lecture attractive et qui lui donnent du relief. Les anciens y trouveront une part de leur histoire et les plus jeunes, un éclairage sur un passé récent. Surtout, ils pourront retenir les propos de Saint-Exupéry que Jean-Claude Sabin, en homme de challenge, a fait siens : « ils ne savaient pas que c’était impossible, alors ils l’ont fait ».

La rédaction

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