National | Par La rédaction
Lundi 14 novembre, l’association Fleur d’Aubrac a tenu son assemblée générale à Antrenas. L’occasion pour les éleveurs d’aborder les sujets de préoccupation du moment et de se questionner sur l’avenir de cette filière de qualité.
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Près d’une quarantaine d’éleveurs ont assisté à l’assemblée générale de l’association Fleur d’Aubrac. Les discussions sur la rentabilité de la Fleur d’Aubrac en ces temps de crise ont phagocyté les discussions de la matinée.
«On veut bien être fidèle à la marque, mais il faut que les prix suivent» : c’est en substance le message des éleveurs, pour que la filière puisse continuer de vivre. Car ils ont averti qu’au vu des prix pratiqués en Fleur d’Aubrac, de l’explosion des coûts pour l’engraissement et de prix bien plus intéressants, notamment en maigre, les éleveurs risquent bien d’abandonner la filière… et de précipiter la fin de la Fleur d’Aubrac. «Et si nous arrêtons totalement, nous ne nous relèverons pas», a pointé Hervé Chapelle, directeur de Célia. «Pourquoi ce sont toujours les agriculteurs la variable d’ajustement ?», ont lancé les agriculteurs, remontés. «En tant que chef d’entreprise, nous devons aussi aller vers les activités les plus rentables», a pointé Julien Tuffery. «Et aujourd’hui, les arguments manquent un peu pour dire «continuons», si ce n’est, «ayez la foi». Mais économiquement, pour la rentabilité du système, ça semble compliqué. Comment, demain, continuer à faire de la Fleur d’Aubrac sans augmentation importante de la grille, je vous avoue qu’il est difficile d’y croire».
La première partie de la matinée a donné lieu à une première passe d’armes, puisque Sébastien Brouzes, éleveur, a présenté sa démission suite au conseil d’administration houleux précédant l’AG. Selon le président de l’association, David Cayrel, la grille de prix en Fleur d’Aubrac a du mal à augmenter «alors qu’on voit que tous les voyants sont dans le rouge», par rapport à la hausse des charges, notamment. «Ce matin, on a eu un débat assez houleux sur la grille de prix parce qu’elle se fait toujours en concertation avec les abatteurs et les bouchers. Au final, on est arrivés à un accord de 10 centimes d’augmentation, au niveau des éleveurs, ce qui ne satisfait aucun côté, mais on a fait au mieux. Il y a déjà une hausse au mois de septembre, et il y en aura une autre à partir de la semaine prochaine», a annoncé l’élu.
Des pistes pour améliorer la rentabilité
«En tant qu’éleveurs, vous êtes confrontés à une évolution que vous n’avez jamais vue par le passé», a détaillé Hervé Chapelle, en introduction du thème choisi par l’association : «L’engraissement des Fleurs est-il toujours rentable ? Les pistes pour maintenir la rentabilité de cette production». Pour y répondre, Hervé Chapelle a exposé le côté économique et Frédéric Mazars, responsable équipe bovins viande à la Chambre d’agriculture d’Aveyron, a évoqué la rentabilité en engraissement via la nutrition animale, notamment. «Même avant la crise ukrainienne, nous avions une flambée des prix», a détaillé Hervé Chapelle. L’indice des coûts de production aurait, selon les calculs fournis par l’Idele, augmenté de près de 80 cts €/kg carcasse en près d’un an. Autre phénomène qui est venu chambouler un marché fragile : la hausse des prix du maigre (près de 50 cts € en un an, donc 160 €/tête). «Il y a deux ans, les prix du maigre, c’était le marasme». La question se pose donc de savoir si les éleveurs gardent leurs génisses pour l’engraissement ou les vendent en maigre. Un phénomène de hausse qui s’explique en partie par la décapitalisation du cheptel bovin d’un côté, et de l’autre côté, les pays tiers qui tirent les prix vers le haut (notamment l’Algérie). «Jusqu’à Noël, on a un bateau planifié toutes les semaines pour l’Algérie», a souligné Hervé Chapelle, même s’il reste prudent sur la solidité de ces marchés dans le temps.
La rentabilité de la Fleur d’Aubrac est aussi liée à une conjoncture sociale fragile : les circuits de commercialisation dépendants, beaucoup de boucheries traditionnelles, «qui souffrent ces derniers temps», a rappelé Hervé Chapelle. De plus, la vente de viande non-transformée marque le pas face au marché du haché qui grignote peu à peu des parts sur les autres types de viande. Et pour rester performant, notamment dans un contexte haussier, la technicité est importante. Pour Frédéric Mazars : «Finir les animaux, ça reste important mais évidemment, il faut aussi regarder la marge qui vous reste», a-t-il expliqué. «Il y a trois fondamentaux pour les animaux : l’eau, le sel et la fibre», a lancé le technicien. «On ne peut pas engraisser de bête sans cela». L’eau, par exemple, selon si elle est mal distribuée ou peu accessible, même si elle est disponible en abondance, peut «être un vrai frein à la performance des animaux». En plus de l’hydratation, la carence en sel et le manque de fibre sont aussi essentiels à une bonne production, technique.
Fourrage, compléments de rations : tous les moyens sont bons pour être très techniques et gagner en rentabilité. «L’observation des animaux est le premier outil des éleveurs», a, par ailleurs rappelé Frédéric Mazars, une observation importante qui permet de repérer rapidement quels sont les déséquilibres possibles d’un troupeau. Et bien évidemment, de les corriger pour retrouver une rentabilité.
Marion Ghibaudo
Le Réveil Lozère