Aveyron | Par Didier Bouville

Première finale « sans pression » pour Amélie Guerrisi et Monroe

Ils sont trois Aveyronnais qualifiés pour la finale du championnat de France des concours de chiens de troupeau du 30 septembre au 1er octobre à Sévérac-le-Château. Après Stéphane Maymard et Neige, locaux de l’étape (lire VP du 29 juin), Denis Malbouyres et Grand Bill (lire VP du 3 août), rencontre avec la dernière concurrente qui représentera le département, Amélie Guerrisi, salariée agricole, et sa chienne Monroe du Mont Kerchouan.

De son enfance dans les Alpes de Haute Provence, aux côtés d’un berger qui gardait des brebis avec son chien, est née la passion d’Amélie pour les chiens. Issue d’une famille d’artisans, elle n’était pas pré-destinée à l’agriculture et pourtant : « j’ai toujours voulu travailler avec les animaux », confie d’emblée la jeune femme. Son BEP puis son BPREA en poche au lycée de Carmejane près de chez elle, elle démarre ses premiers jobs comme salariée dans des exploitations avec des chiens pas dressés et très têtus, mais Amélie cultive sa passion jusqu’à trouver son propre chien, un Border Collie, « aux capacités énormes pour marcher aux murs mais pas forcément pour le travail dans un élevage! », sourit-elle.

« Jean-Michel Jolly, mon meilleur professeur! »

Une rencontre va changer la donne, celle avec Jean-Michel Jolly, formateur agréé par l’Institut de l’élevage sur le dressage des chiens de troupeau, alors installé lui aussi dans les Alpes de Haute-Provence. « Je lui ai acheté Innée. Il fut mon meilleur professeur! ». A ses côtés, Amélie se forme, s’entraîne et démarre ses premiers concours. Elle se souvient encore de son premier : « avec ma chienne Innée, âgée d’à peine 1 an, on a fini dans le top 3! C’était vraiment super! ». Les bonnes aptitudes de sa chienne ainsi que les longues séances d’entraînement avec Jean-Michel Jolly y sont pour beaucoup, selon la jeune femme, qui travaillait déjà comme bergère. « Innée m’a accompagnée dès mes premières gardes de troupeau à l’âge de 6 mois. Je ne me voyais pas garder 500 brebis sans un chien! », sourit Amélie.

Un peu lasse de ce métier de bergère qui ne lui laissait que peu de temps libre et mal rémunéré par rapport aux longues journées de 7h à 19h… Amélie a fait ses valises pour rejoindre l’Aveyron… Une annonce d’un éleveur de chèvres à Arvieu, qui recherchait un salarié agricole : « un poste avec des jours de repos, bien rémunéré et qui me permettait de continuer à travailler avec mon chien, je n’ai pas hésité! ». Tous les 1 à 2 ans, Amélie change d’exploitations, découvre les chèvres, les porcs, les vaches, les brebis laitières… « La plupart des fermes où je travaille, il y a des chiens et sinon les animaux s’y habituent très vite », explique la jeune femme. Si ce n’est plus Innée qui l’accompagne (elle est décédée à l’âge de 3 ans), Amélie est accompagnée de sa fille, Monroe du Mont Kerchouan, issue de la même lignée de chez Jean-Michel Jolly. « Quand Innée est morte, je n’avais pas préparé sa suite car elle était encore jeune, j’ai dû rattraper le retard avec Monroe, aujourd’hui âgée de 7 ans et qui va m’accompagner à la finale à Sévérac », explique Amélie.

Si elle a moins de temps pour s’entraîner et qu’elle voit beaucoup moins Jean-Michel Jolly désormais installé dans la Creuse, Amélie continue de travailler avec ses chiens : « Un chien s’il n’a pas d’utilité, il n’a pas d’intérêt pour moi! Si on ne peut pas le faire travailler, ce n’est pas la peine d’en avoir un! », tranche-t-elle. De temps en temps, elle retourne chez Jean-Michel Jolly, « sa famille de cœur » pour s’entraîner et pour garder son troupeau aussi en son absence! « Et si j’ai un problème avec mon chien, mon compagnon filme la difficulté et on demande conseil par téléphone à Jean-Michel! », raconte Amélie. « En 10 ans, j’ai obtenu 4 « c’est bien! » de la part de Jean-Michel! », sourit Amélie dont les premiers supporters sont sa famille qui sera d’ailleurs présente à Sévérac. Mais bien souvent, je connais ses remarques : « Sors tes mains de tes poches! Bouge! »! Des conseils qui lui ont permis de progresser. De ses échanges avec d’autres utilisateurs, la jeune femme apprend aussi : « On apprend beaucoup en regardant les autres évoluer en concours. En observant le passage des autres, on évite parfois des erreurs aussi! »

Et elle en profite pour repérer quelques reproducteurs pour les femelles, car Amélie ne travaille qu’avec des chiennes : « les mâles ont un démarrage au dressage plus long et comme je suis très impatiente, je suis vite agacée! », reconnaît-elle.

« Se préparer au concours demande du temps et de l’endurance »

Des concours, la jeune femme en fait de temps en temps mais pas de façon assidue : « Se préparer à un concours prend du temps, pour le chien comme pour moi. Cela demande de l’endurance! Et souvent les épreuves sont éloignées, il faut prévoir le déplacement. Mais de temps en temps, je suis contente de participer parce qu’on se fait des copains, on parle de chiens entre passionnés, c’est ça qui me plaît surtout! », confie Amélie qui apprécie l’ambiance bon enfant. « Je viens plus pour le contact avec les gens que pour la gagne! ». En 2022, ses trois meilleurs concours lui ont permis de se qualifier pour la finale du championnat de France qui se déroulera à domicile cet automne à Sévérac. Sa première vraie finale puisqu’elle s’était qualifiée en 2020 mais en raison de la crise sanitaire, la finale n’avait pu se tenir. « Ma première vraie finale est en Aveyron, c’est super! Au sein de l’ACT 12 (association des chiens de troupeaux de l’Aveyron), on s’est battu pour la décrocher! », explique la jeune femme qui a rejoint l’association dès son arrivée en Aveyron. « Il y a un groupe très sympa qui se retrouve régulièrement dans une bonne ambiance et je me souviens encore de la dernière finale que nous avons accueillie sur bovin, à La Roque : tout le monde en parle encore! ». Preuve de cette belle entente, ils sont plusieurs membres de l’association à faire le déplacement à la finale du championnat de France cet été, près de Nantes.

« En finale, je vais jouer contre ceux que j’admire »

Cette finale à Sévérac, Amélie y va sans pression : « Je vais jouer contre ceux que j’admire! Ce ne sera que du plaisir! Et puis j’ai hâte de découvrir le parcours, ce n’est jamais le même en interraces, c’est ça qui est super d’ailleurs pour le challenge. Ça oblige à réfléchir à comment aborder les obstacles, à se concentrer, parce que la routine ce n’est pas drôle! Louper des obstacles, ce n’est pas grave, ce qui m’importe c’est de ne pas avoir à crier pendant tout le parcours. Tout simplement profiter du moment et relever au mieux le défi! Moins on est stressé et moins le chien est stressé et plus le parcours est propre ». Amélie pourra aussi retrouver les copains : « Là-bas il y a un bon groupe d’utilisateurs de chiens de troupeau et même ceux qui n’ont pas de chien, viennent aider, c’est une belle dynamique locale », salue-t-elle.

Passionnée de l’agriculture et souhaitant vivre de cette passion, Amélie cherche une exploitation à reprendre : « je veux créer mon propre élevage de chiens de travail démarrés couplé à un élevage de brebis allaitantes en plein air », avance-t-elle, soucieuse de se dégager du temps pour faire travailler des chiens comme elle voudrait. Et pour la suite des concours, elle a acheté une autre chienne chez André Trémolières, adhérent de la première heure à l’ACT 12. « Comme dirait Jean-Michel Jolly, il faut que je me bouge pour assurer la relève! ».

Eva DZ

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