National | Par Didier Bouville
Dans une conférence de presse début septembre, les éleveurs de la Fédération nationale bovine (FNB) se sont inquiétés de la baisse constante de la production française et des conséquences économiques qui en découlent.
« On a perdu 110 00 vaches allaitantes en un an, plus de 100 000 vaches laitières dans le même temps, chiffres auxquels il faut ajouter un déficit de naissances en veaux de 150 000 têtes. Ces derniers représentent environ 15 à 20 % de nos exportations en Italie », a annoncé Cédric Mandin, secrétaire général de la Fédération nationale bovine (FNB), lors de la conférence de presse suivant leur conseil fédéral du 5 septembre. Cette décapitalisation se traduit également dans la chute du nombre de bêtes abattues, en recul global de 5,3 % sur un an (juillet 2022 à juillet 2023) selon Agreste, le service statistique du ministère de l’Agriculture. « Il est -4,3 % sur les gros bovins », a précisé Patrick Bénézit, président de la FNB. Or dans le même temps, la consommation ne faiblit pas, en quasi stabilité à -0,5 % sur les six premiers mois de l’année. Les importations viennent naturellement compenser cette demande toujours soutenue. L’occasion pour Patrick Bénézit de s’opposer fermement aux accords de libre-échange que l’Union européenne s’apprête à signer, avec le Mercosur et l’Australie notamment. La présidence espagnole fait tout pour que Bruxelles conclue rapidement avec les pays d’Amérique du Sud. La partie commerciale de l’accord prévoit une libéralisation partielle des importations de viande bovine, : ainsi pas moins de 99 000 tonnes d’équivalent-carcasse (téc) de viande bovine pourront être importées en UE depuis le Mercosur avec un droit de douane réduit. « Le Brésil et l’Argentine, qui ne respectent pas nos normes de production, ont déjà mis, en dix ans, autant de bovins sur le marché français que tout le cheptel existant dans notre pays », s’est offusqué le président de la FNB.
IED, Egalim…
Confrontés à une progression régulière des charges « d’environ 5 centimes par kg », les éleveurs voient leurs coûts de production toujours supérieurs à ceux du prix du marché. « Par rapport à d’autres productions, nous avons toujours décroché d’environ 50 à 60 cts/kg », a précisé Cédric Mandin « On veut couvrir nos coûts de production », a-t-il insisté. L’une des solutions reste « la contractualisation au coût de production interprofessionnel. C’est la seule manière de donner des perspectives aux éleveurs », a insisté Patrick Bénézit. Le contexte politico-économique se tend encore plus avec la volonté d’inclure les élevages bovins dans la directive « émissions industrielles », dite directive IED. « On n’a clairement rien à faire là-dedans », a-t-il lancé expliquant que le méthane des vaches, pointé du doigt dans ces directive est cependant plus volatil que le carbone qui reste plusieurs centaines d’années dans l’atmosphère. Mais la FNB reste cependant consciente qu’en termes de planification écologique, « on peut, comme tout le monde, faire mieux pour diminuer notre empreinte carbone », a dit Patrick Bénézit qui fait remarquer : « Nous avons perdu trois millions de vaches en 60 ans, dont un million sur les sept dernières années », comme pour mieux souligner que cette décapitalisation a aussi participé à réduire cette empreinte…
Surtout, le président de la FNB attend du gouvernement « de la cohérence » et aussi le respect de la loi. « Il doit faire respecter les lois Egalim », a-t-il martelé s’inquiétant des prises de positions du ministre de l’Économie Bruno Le Maire. Pour faire baisser l’inflation, celui-ci entend bloquer les prix de plusieurs milliers de produits, notamment alimentaires. « Nous nous y opposons car nous estimons que des économies peuvent être réalisées sur d’autres secteurs comme l’énergie ou le transport », a observé le président de la FNB qui considère que le modèle d’élevage français reste l’un des plus vertueux.
Christophe Soulard