Aveyron | Par La rédaction
Si la truffe noire est la plus connue et la plus réputée notamment sur les tables de fin d’année, en Aveyron on ramasse aussi la truffe blanche récoltée l’été entre juin et août. Moment de cueillette avec Pierre et Ado accompagnés de leur chien Olga et Paco.
Sur les hauteurs de Paulhe, dans la vallée du Tarn, Pierre Julien a planté il y a une douzaine d’années des chênes truffiers. Ces arbres ont remplacé les cerisiers dont la récolte est chaque année un peu plus compliquée en raison des aléas climatiques, de la Drosophila suzukii. L’ancien agriculteur a planté à la fois des chênes mycorhizés par la truffe à spore noire que l’on récolte de décembre à février ainsi que par la truffe blanche qui se récolte entre juin et août. Mais pour voir un chêne truffier produire ses premiers trésors, il faut attendre 10 ans environ…
«La truffe blanche est moins parfumée que la noire, elle est aussi moins côtée mais moi je l’aime bien», sourit Pierre qui la ramasse avec sa fidèle chienne Olga qu’il a initiée à la truffe une semaine après sa naissance ! «Si jeune on ne les amène pas au pied d’un arbre bien sûr mais on leur apporte une truffe que l’on renouvelle chaque semaine pour que le chien s’habitue à l’odeur et ne l’oublie pas et à 2 mois, on commence à travailler ensemble pour chercher les truffes», raconte Pierre. Ce jour-là il était accompagné de son copain Ado et son chien Paco. Et sur ces parcelles bien exposées, qui surplombent la vallée du Tarn, les chiens s’en sont donnés à cœur joie ! Au fil de la balade, le panier se remplit des perles noires que l’on pourrait confondre avec la truffe noire mais qui en fait, sont blanches à l’intérieur. Mais les truffes blanches, Pierre les garde pour sa consommation personnelle, pour parfumer le beurre qui agrémentera les toasts des apéritifs de l’été entre copains ! «La production de truffe blanche en Aveyron n’est pas suffisante en volumes pour que nous la commercialisions comme la truffe noire. C’est un petit plaisir personnel et ça nous permet aussi de faire travailler nos chiens pour les trouver !», sourient Pierre et Ado.
Passionnés et gourmets
Les deux compères ont profité de l’occasion pour présenter l’association aveyronnaise de trufficulture à laquelle ils adhèrent. «Les membres sont tous des passionnés de la truffe noire (tuber melanosporum) mais aussi de toutes les truffes : musquée (tuber brumale), blanchette (tuber borchii), d’été (tuber aestivum), d’automne ou de Bourgogne (tuber uncinatum). Parce que la truffe pousse partout sur les sols calcaires, elle est présente dans tout le département, chez nous dans la vallée du Tarn mais aussi à Espalion dans les terrasses de vignes, sur le Causse Comtal…», présente Pierre. L’association rassemble entre 25 et 30 adhérents de tout l’Aveyron donc. «A la base, des trufficulteurs amateurs ou professionnels se sont réunis afin de mutualiser leurs réussites mais aussi leurs échecs dans le but de progresser ensemble», poursuit-il. Cultiver des truffes exige en effet beaucoup de travail et de la patience. Et la trufficulture est encore loin d’être une science exacte car le champignon recèle de nombreux mystères notamment au niveau de sa nutrition et de sa reproduction.
Cette association à but non lucratif, veut promouvoir et développer une trufficulture respectueuse de l’environnement afin de proposer des truffes de qualité aux consommateurs. Elle représente et défend aussi les intérêts de ses adhérents dans son secteur d’activité. Elle leur propose des informations, des appuis techniques, des formations. Enfin, elle accompagne les producteurs à mutualiser leurs achats afin de profiter de meilleurs tarifs (notamment pour l’achat de tourbe ou encore pour l’achat de plants contrôlés dans le cadre d’un GIE Occitanie auprès de pépiniéristes). Mais aussi pour la commercialisation de leur production. Ainsi, pendant l’hiver, tous les lundis, les producteurs envoient par transporteur, leur précieuse récolte à un conservateur qui leur paie la production en fonction du cours du marché de Lalbenque (Lot), référence en la matière. Le prix est déterminé en fonction de la qualité de la truffe : «Nous sommes très rigoureux sur la gestion de notre culture», explique Pierre. «Nous réalisons régulièrement des analyses de terre pour vérifier le Ph car si celui-ci n’est pas assez élevé, il faut ajouter de la chaux, du calcaire autour des arbres. Il ne faut pas oublier non plus de mettre de la tourbe au printemps pour ensemencer». Une tourbe réalisée à partir de truffes broyées qui n’ont pu être commercialisées.
La truffe, une bonne idée de diversification
Les trufficulteurs de l’Aveyron ont envie de transmettre ce savoir-faire, cette passion au plus grand nombre. «C’est une production méconnue, que l’on pense réservée à une certaine élite étant donné son coût mais elle rend d’énormes services à tout point de vue», défendent les membres de l’association. Débroussailler des parcelles pour planter des arbres truffiers est un moyen de lutter contre les feux de forêts, particulièrement dans le contexte de réchauffement climatique, argumentent-ils. La culture de la truffe valorise les paysages et elle est, en plus, peu consommatrice d’eau. Mais les producteurs restent vigilants aux périodes de sécheresse parce que si les arbres truffiers ne souffrent pas du manque d’eau, en revanche cela impacte les truffes et certains ont constaté des mortalités au printemps 2022… L’association encourage une trufficulture de qualité, sans intrant chimique.
Par ailleurs, la France consomme beaucoup plus de truffes qu’elle n’en produit. Si la production en Aveyron est modeste, de réelles potentialités existent étant donné ses nombreux sols calcaires et ses terrains pauvres et pentus où la truffe peut être une alternative à la déprise agricole. De fait, l’association aveyronnaise de trufficulture, en lien avec la Chambre d’agriculture, souhaite faire connaître la trufficulture au monde agricole, comme une opportunité de diversification sur les exploitations. Et la truffe constitue aussi un bel ingrédient dans la réputation du bien manger en Aveyron…
Une association ouverte à tous
A ce sujet, l’association aveyronnaise souhaite sensibiliser les consommateurs car «cuisiner la truffe nécessite des connaissances de base pour ne pas gâcher le produit». «Apprendre aux consommateurs à déguster la truffe quand c’est la saison mais aussi leur éviter d’acheter des produits dits «truffés» dans lesquels il n’y a pas ou peu de truffe mais des arômes chimiques», alertent les membres de l’association qui invitent épicuriens, gourmets et autres gastronomes ou simples consommateurs à les rejoindre ! Tout comme les mycologues, botanistes, biologistes amateurs ou professionnels pour décrypter les mystères encore nombreux autour de ces champignons ! Enfin l’association envisage aussi de multiplier les contacts avec le milieu scolaire ou encore des publics de tout âge pour leur faire découvrir, goûter voire cultiver la truffe.
Contact
Toutes les personnes intéressées par la trufficulture, amateurs ou professionnels, peuvent contacter l’association aveyronnaise de trufficulture :
– assotrufficulture12@gmail.com
Ou auprès des co-présidents :
– Arnaud Cueysse : 06 86 56 84 05
– Manuel Franques : 06 89 91 45 35
Eva DZ