National | Par La rédaction
Dans un contexte de baisse des prix et de flambée des matières premières, l’élevage porcin français va devoir relever plusieurs défis, parmi lesquels la mise en œuvre de la contractualisation, l’entrée en vigueur des méthodes alternatives de castration ou encore le déploiement du nouveau cahier des charges «Le Porc Français».
Quelles sont les conséquences de la baisse des prix observée ces derniers mois sur l’équilibre économique des exploitations porcines ?
François Valy : «La chute des cours du porc depuis le mois de juin (1,23€ le 8 novembre à Plérin, Ndlr) vient s’ajouter à la flambée des cours des matières premières dont l’ampleur nous a tous surpris. Pour compenser la hausse du prix de l’aliment, il faudrait que les cours soient 30 centimes plus élevés. Cette situation inquiète aujourd’hui toute la filière, des fabricants d’aliments aux banques et menace la pérennité de nombre d’exploitations. Certaines d’entre elles ont perdu jusqu’à 100 000€ depuis le début de l’automne et ne peuvent plus guère s’appuyer sur la trésorerie des bonnes années, dont la dernière remonte à 2019. Il existe une perspective d’inversion de la tendance avec la hausse récente des cours en Chine, dont la fermeture aux exportations européennes a provoqué un reflux de marchandises sur les autres marchés et notamment sur la France. J’espère que le commerce pourra repartir vers cette destination en fin d’année ou au pire en début d’année prochaine, ce qui devrait contribuer à rééquilibrer le marché.
Le gouvernement a annoncé l’entrée en vigueur de l’obligation de contractualisation pour les porcs castrés dès le 1er janvier 2022 dans le cadre de la loi Egalim2. Êtes-vous satisfait de cette décision ?
FV : C’est une bonne nouvelle, même si je regrette que l’on doive en arriver à une intervention publique pour réguler les relations entre opérateurs. La FNP est favorable de longue date à la contractualisation qui permet de garantir les prix sur une partie de la production et sur la base d’indicateurs révisables en cours d’exécution. Ce fonctionnement est étranger à la culture des abattoirs mais ils vont bien devoir s’y mettre. L’enjeu est bien évidemment aussi la prise en compte des surcoûts des méthodes alternatives à la castration à vif. Nous avons demandé au gouvernement que la loi s’applique sur les porcs nés après le 1er janvier, ce qui nous laisse quelques mois pour trouver une manière de trouver une compensation financière qui s’applique sur tout le territoire. Pour revenir aux contrats, je reste persuadé qu’il est irréaliste de penser que nous soyons un jour totalement déconnectés des prix mondiaux. Le marché au cadran a sans doute des faiblesses, mais il fait partie de notre système. Sans prix directeur, le risque est qu’il y ait, comme on le voit dans le lait, autant de prix qu’il y a d’entreprises.
Existe-t-il aujourd’hui un risque de développement incontrôlé du mâle entier qui porterait préjudice à la filière porcine française ?
FV : C’est le marché qui doit le décider. Notre souhait, c’est que le différentiel économique lié à la castration fasse l’objet d’une plus-value car il existe des charges différentes entre mâles castrés et animaux «entiers».
Vous présentez le déploiement rapide du nouveau cahier des charges du Porc Français comme un outil susceptible de favoriser la production nationale, notamment en restauration collective. Où en est-on de la mise en œuvre des critères supplémentaires liés à la bientraitance animale comme l’abreuvement, la lumière, la densité ou la diminution de l’usage des antibiotiques ?
FV : La crise du Covid, avec ses conséquences sur les matières premières et sur la main d’œuvre, et la chute des prix n’ont pas facilité la mise en place de mesures qui nécessitent pour certaines de nouveaux investissements. Cela reste néanmoins un chantier prioritaire qui mobilise les éleveurs dans toutes les régions. L’objectif est d’être prêt d’ici l’été 2022 et de faire entrer un maximum d’exploitations dans la démarche. Nous voyons déjà les effets positifs du mouvement que nous avons engagé, puisque certaines entreprises de transformation ont déjà manifesté leur intention d’anticiper l’interdiction du «transformé en France» qui entrera en vigueur en 2023 et de s’engager dans Le Porc Français. L’objectif est bien sûr que la restauration collective s’engage, notamment au travers des marchés publics, à favoriser les cahiers des charges les mieux disant».
La rédaction