Aveyron | Par La rédaction

Entrepreneurs des Territoires de l’Aveyron : Une identité et un professionnalismeà défendre et à pro

A hauteur d’une entreprise en moyenne par commune en Aveyron, les Entrepreneurs des Territoires de l’Aveyron – EDT 12 participent activement à l’économie locale et par leurs services et disponibilités, accompagnent les agriculteurs et plus largement les collectivités et acteurs économiques, dans l’aménagement et l’entretien du territoire. Une mission qu’ils ont à cœur de mener à bien malgré les difficultés qu’ils rencontrent, notamment hausse des charges, inflation et contexte climatique de sécheresse… Les responsables de la structure, Joël Guibert et Michel Griffoul, dressent un point non exhaustif du contexte, des enjeux et des perspectives qu’ils entrevoient pour les EDT du département.

Joël Guibert, au micro et Michel Griffoul, à gauche, co-président les Entrepreneurs des territoires de l’Aveyron (photo Pauline Loumont)

Comment se portent les EDT en Aveyron ?
«Le contexte géopolitique, économique, social et climatique avec une sécheresse historique, n’est pas sans impacts pour nos entreprises. Dans notre environnement proche, nous sommes tous marqués, sans aucun doute, par une inflation jamais vue depuis plus de 25 ans et encore une fois, par une année sèche dans l’ensemble du département. Les conséquences sont directes pour nos entreprises : nos clients récoltent trop peu, doivent partir aux achats. Ils réduisent leur cheptel, ils sèment davantage pour faire des stocks l’année suivante… Nos machines de récoltes ont fait moins d’heures.
Autre élément de contexte, la société française paraît plus violente, moins sûre. Même dans nos campagnes il y a des vols de carburant, de matériel GPS, des machines forestières peuvent être incendiées.

Comment réagissent les Entrepreneurs de travaux agricoles face à ce contexte bouleversé et incertain ?
Du fait de leur petite taille, nos entreprises sont solides et fragiles à la fois…
Solides car réactives face aux pointes de travail, bien entourées par de bons partenaires, faisant preuve d’imagination.
Fragiles car le chef d’entreprise est au four et au moulin bien souvent et un poste peut être délaissé (entretien, gestion, facturation…). Disposant bien souvent de peu de fonds propres, le cap d’une année difficile peut s’avérer fatal. Fragile également parce qu’un évènement personnel, un accident, une maladie, une séparation peut fragiliser l’entreprise et nous soulignons toute l’importance du rôle du travail du conjoint, a minima un soutien moral.

Comment faire face à l’inflation ? A-t-elle des conséquences sur le prix des prestations ?
En mars 2022, l’augmentation des prix a été un sujet lors de notre assemblée générale particulièrement sur le GNR. Malheureusement, cela concerne aussi tout ce que nous achetons sans exception (carburant, adblue, prix des pièces et main d’œuvre, prix des machines neuves, augmentation des assurances, salaires…). Aussi, la hausse des prix des prestations est devenue inévitable.
Il semblerait qu’il y ait 2 façons de voir. Des entrepreneurs considèrent que leurs clients, de longue date, impactés eux aussi par le contexte, par empathie, partageant comme une communauté de destin, aient modéré ces hausses pourtant indispensables, en se disant «cela ira mieux l’année prochaine»… D’autres ETA et ETF ont pratiqué les augmentations avec moins de questionnement considérant qu’il s’agit d’abord de la survie de leur entreprise. Ce sont des hausses à 2 chiffres : 15 voire 20 % dans bien des cas, bien sûr à adapter à l’activité.

Et face à la sécheresse ?
Dès le début de l’été, la tendance sèche a diminué les rendements avec moins d’heures de travaux pour les machines. Une seule consolation, les fenêtres de travaux ont été plus longues bien qu’il ait fallu éviter les heures chaudes à cause du risque incendie.
La combinaison de ces deux facteurs, augmentation des coûts et diminution des récoltes pourrait donner sur l’exercice 2022 des comptes de résultats… sans résultat.

Avez-vous ressenti une baisse de vos prestations ?
Je cite Gérard Napias, président de la fédération nationale des entrepreneurs de travaux agricoles : «dans les départements, nos clients (agriculteurs, collectivités locales…) sont de plus en plus nombreux à rechercher des entreprises pour prendre en charge leurs travaux parce que personne ne trouve personne pour travailler, que le prix des machines s’envole et avec lui les délais de livraisons». Je crois que cela se vérifie dans notre département. Pour autant, nos entrepreneurs doivent veiller à bien cerner tous les postes de dépenses quand il s’agit de démarrer une nouvelle activité pour pratiquer «un prix viable» pour l’ETA ou l’ETF.

La première mission de votre structure est avant tout la représentativité et la défense des intérêts des Entrepreneurs de travaux agricoles. Quels sont les sujets syndicaux qui vous préoccupent ?
Nous avons rencontré les services de la préfecture en mars 2022 pour leur faire part de l’impasse dans laquelle nous allions nous trouver avec toutes ces hausses de charges, le GNR était à ce moment là à plus de 1,50 euro/litre. Nous avons rappelé dans un premier temps quels sont nos métiers, leur spécificité et leur importance dans ce département d’élevage. Nous avons argumenté (et c’est facile) pour expliquer notre situation intenable. La mobilisation de notre fédération nationale nous a permis d’obtenir un remboursement partiel de la TICPE. Nos entreprises ont également bénéficié de 15 centimes/L HT au 1er avril 2022, puis 30 cts de septembre à mi-novembre et 10 cts jusqu’à la fin de l’année pris en charge par l’Etat. Notre syndicat a également proposé une ligne «surcharge» carburant sur les factures.
Nous avons évoqué aussi les comportements de concurrence déloyale parfois sous couvert d’entraide, la circulation de nos engins sur nos routes… Pendant une heure nous avons senti que nous étions écoutés, on nous a rappelé ce qui a été obtenu qui peut nous concerner et on nous a dit que nos doléances allaient être transmises au ministère concerné. Pas de décision prise, c’est à Paris que cela se passe…
Autre message que nous avons passé au salon Innov’agri à Ondes cette année auprès d’un responsable de la SRAL (Service Régional de l’Alimentation) sur les contraintes des applicateurs avec agrément sur la région Occitanie, notamment sur la concurrence déloyale. Les EDT qui réalisent des applications de produits phytosanitaires respectent la réglementation en vigueur. Une action est en cours au niveau national à ce sujet. Par ailleurs nos entreprises peuvent prétendre via France Agrimer, à un dispositif d’aide à l’investissement pour accompagner la réduction de l’usage d’engrais de synthèse et de produits phytosanitaires. Nos investissements peuvent être soutenus jusqu’à 40% dans une fourchette de 2 000 à 40 000 euros en fonction du type d’achat. Nous regrettons simplement que le choix du matériel reste restreint et que l’accompagnement soit plus important pour les investissements collectifs…

Et sur le front de l’emploi ?
La suppression en 2016 sauf pour la production agricole, de l’exonération des charges pour les ETARF employant des travailleurs occasionnels demandeurs d’emploi s’apparente à une concurrence déloyale pour nous. Notre fédération nationale demande la remise en place du dispositif.

Des revendications que vous avez l’occasion de porter lors de plusieurs événements…
En effet, nous avons notre assemblée générale annuelle qui s’est tenue cette année fin février. L’occasion de nous retrouver avec nos partenaires. Nos conseils d’administration avec nos 17 membres sont aussi réguliers pour porter les attentes de nos adhérents. Mais aussi pour communiquer sur nos activités à travers notre newsletter hebdo, notre groupe Whats’app, notre page Facebook et notre revue annuelle.
Cette année, en mars, nous étions aussi une bonne délégation d’Aveyronnais à participer au congrès national qui se tenait chez nos voisins du Cantal.

Quelles sont vos perspectives ?
Face à tous ces «chamboulements», Guillaume Le Gonidec de la FNEDT pose une question : «Qui seront les gagnants, qui seront les perdants ?» et répond «Le schéma où l’agriculteur ou le propriétaire forestier recourt à l’entrepreneur poursuit sa progression». En région d’élevage, les niveaux des cours seraient suffisants pour intégrer la hausse des coûts d’autant plus qu’un plan de résilience a été doté…
Dans notre compréhension du syndicalisme, nous savons maintenant que rien n’est jamais acquis, il faut sans cesse revenir «à la charge» et ce n’est pas à tous les coups que l’on gagne. Nous ne l’avons pas toujours été mais nous sommes convaincus que l’action collective ne peut que porter ses fruits à un moment donné. Notre association départementale a donc toute sa place auprès des entrepreneurs pour défendre leur cause et représenter leurs intérêts.
L’arrivée de nouveaux adhérents, qu’ils reprennent des structures existantes ou créent des activités, avec beaucoup d’imagination parfois, nous encouragent à aller de l’avant et à continuer de défendre nos activités, qui contribuent à l’économie locale, à l’emploi en milieu rural et à la dynamique de nos territoires».

Recueillis par Eva DZ –
source revue EDT 12

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En France comme en Aveyron, le battage est à l’origine des entreprises de travaux agricoles. D’abord organisés au sein de syndicat de battage, les entrepreneurs des territoires (EDT) ont depuis, développé leurs activités et services. A l’image de Denis Pailhas entrepreneur depuis plus de 25 ans sur la commune de Millau.Les machines de Denis Pailhas ont été conçues pour travailler dans les pentes, parce qu’une grande partie des zones qu’il couvre sont dans les côteaux. Ces machines sont en effet équipées de correcteur de niveau pour assurer un battage de qualité. Des machines qui nécessitent aussi une certaine dextérité des chauffeurs : «il faut savoir travailler dans le bon sens !», sourit Denis.Le battage, c’est par là que Denis Pailhas…