National | Par Didier Bouville

Collecte des datas : quels risques pour l’agriculteur ?

La data a une valeur. Plusieurs millions de données sont collectées par hectare. Les agriculteurs peuvent garder le contrôle en exigeant des contrats labellisés Data-Agri. Objectif : maîtriser son consentement et encadrer l’usage de ses données par des tiers.

« La data sur mon exploitation, c’est surtout l’autoguidage des tracteurs et les données récupérées par la moissonneuse-batteuse », explique Geoffroy de Lesquen. Cet agriculteur est installé sur une ferme céréalière typique de la plaine de Caen dans le Calvados. Les cartographies de rendements lui permettent notamment de comparer des variétés au sein d’une même parcelle. « Je mène des essais techniques sur les passages de fongicides ou sur les façons de travailler le sol », détaille Geoffroy de Lesquen.

Savoir qui utilise les données de l’agriculteur

Ces précieuses données sont collectées par son matériel agricole. L’usage de ces data par les constructeurs reste cependant nébuleux pour l’agriculteur. « À mon niveau, j’estime ne rien avoir à cacher. La collecte de ces données ne me dérange pas de prime abord. Mais je ne souhaite pas que le constructeur utilise ces informations à des fins commerciales. Si c’est le cas, j’estime juste d’être rémunéré car il s’agit de mes data, d’autant plus que je paye un abonnement assez élevé pour les services numériques du constructeur », estime l’agriculteur.

Data en agriculture : « Il faut signer un contrat »

Cette crainte est potentiellement justifiée, selon Guillaume Joyau, expert Data-Agri. « Les agriculteurs doivent être attentifs sur les manières dont les données transitent depuis leur exploitation, en lien avec leurs fournisseurs. Dans le cas de Geoffroy, comme dans celui de nombreux agriculteurs, aucun contrat n’a été signé. On est donc dans le flou total sur l’usage des données par un constructeur. C’est pourtant important que ce soit clair. » Apporter plus de transparence sur les données collectées, et leurs utilisations ensuite, c’est l’ambition de Data-Agri. Ainsi, pour les constructeurs qui le souhaitent, Data-Agri missionne un cabinet d’avocats indépendant pour auditer et vérifier leurs contrats. Si leurs pratiques sont éthiques, ils peuvent utiliser le label. « Nous communiquons donc auprès du client final, l’agriculteur. Nous le sensibilisons afin qu’il interroge son concessionnaire et demande des contrats qui respectent la charte Data-Agri, car c’est une protection pour lui. »

Un risque de préjudice pour l’exploitant agricole

Des zones d’ombre existent sur l’usage de ces données. Certaines pratiques pourraient porter un préjudice aux agriculteurs. Guillaume Joyau alerte : « Leur vente à des traders sur les marchés à terme ou à des acteurs du marketing direct est un risque. » L’autre danger réside dans la perte de data en cas de changement de marque ou de fournisseur. Le contrat labellisé Data-Agri rappelle que l’exploitant agricole reste propriétaire de ses données.

Data-Agri, un label au service des agriculteurs

Data-Agri est un label qui fait la promotion des bonnes pratiques sur l’usage maîtrisé des données des agriculteurs. Le projet est porté par la FNSEA et Jeunes Agriculteurs, mais il s’adresse à tous les agriculteurs. La charte définit treize principes. Tous sont censés se retrouver parmi les conditions générales de vente (CGV) de tout acteur collectant des données sur l’exploitation agricole. Un label, reconnaissable avec le logo Data-Agri, valorise les opérateurs respectant les principes de la charte.

Parmi les priorités de la charte figurent : la lisibilité pour l’agriculteur, la transparence, la maîtrise de l’usage des données par l’agriculteur la portabilité ou la sécurité des informations collectées.

Plus d’informations disponibles sur data-agri.fr

La rédaction

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