Aveyron | Par Jérémy Duprat
Un nouveau président pour APO. Une extension de son site de Sainte-Radegonde. Et des défis à relever pour le premier groupe porcin d’Occitanie.
Le nouveau président d’APO Lionel Tauriac, à gauche, et le directeur général Mickaël Le Gallic.
47 ans de moyenne d’âge
Depuis septembre, Alliance porci d’Oc (APO) est présidé par Lionel Tauriac. Il succède à Norbert Pradalier après 19 ans de loyaux services. Une coopérative qui tient à davantage communiquer. «Le dicton vivons heureux vivons cachés, nous colle à la peau. Mais il n’est plus d’actualité. APO et ses éleveurs font un travail de qualité : il est temps de le faire savoir», explique le nouveau président Lionel Tauriac. Éleveur à Colombiès depuis 1990, il est installé en individuel avec 380 truies. Il connaît la coopérative comme sa poche puisqu’il y a pris ses marques quasiment dès sa création en 1993.
Aujourd’hui, APO compte plus de 200 éleveurs dans tout le Sud-Ouest de la France. Ce qui classe la coopérative en tête des groupes porcins en Occitanie et le 7ème au niveau national. Avec une moyenne de 185 truies par ferme, 11 000 porcs sont abattus chaque semaine pour un chiffre d’affaires de 133 millions d’euros. Il est intéressant de noter que la moyenne d’âge des éleveurs est de 47 ans : un chiffre relativement bas au sein de la profession agricole. Les éleveurs sont engagés au sein de différentes marques, labels et SIQO (Signes officiels de la qualité et de l’origine). Et 5 outils de transformation complètent le tableau : à Lacaune avec un atelier de découpe et un abattoir, à Villeneuve avec un salaisonnier, à Montpellier avec un distributeur et au siège, à Sainte-Radegonde.
Fort de ce succès, avec une progression des volumes traités de 5% en 2021, APO a investi 10 millions d’euros pour étendre et moderniser son usine de Sainte-Radegonde, juste à côté de son siège, dans la zone d’activités d’Arsac. «Nous organisons une visite le 21 mars, lors de laquelle la presse est invitée et le Préfet sera présent. Les travaux ont commencé il y a deux ans pour cette extension de 1500 m2. C’est un gros investissement pour moderniser la production et la chaîne du froid, avec une capacité de traitement augmentée, des tunnels de congélations, 1200 emplacements en froid négatif… Nous avons également investi dans un système de récupération de chaleur pour chauffer notre eau, chauffer sous les tunnels de congélation pour le dégivrage… L’actualité nous donne raison je crois», estime Mickaël Le Gallic, directeur général d’APO.
1 porc élevé, 2 abattus, 3 consommés
Des travaux semblables ont été menés à Lacaune. Une décision stratégique. En 2021, l’activité export de la coopérative a représenté 15% du CA. Et qui dit export, dit congélation. «L’Asie est un gros consommateur de porcs. Nous envoyons le produit congelé, jusqu’à des conteneurs frigorifiques qui livrent ensuite les produits dans les pays asiatiques. Jusque-là, nous sous-traitions ce domaine. Mais stratégiquement, il est délicat de dépendre d’un prestataire. Alors, nous avons pris les choses en main pour nous doter d’un outil qui nous redonne de l’autonomie sur ce volet», révèle Mickaël Le Gallic.
APO reste et restera centré sur le circuit court. Pourtant, en filière porcine, difficile de passer outre l’export. «Nous ne vendons pas toutes les parties du porc sur le marché intérieur. C’est compliqué de commercialiser les pieds, la tête, les oreilles… Le marché n’est pas porté vers ces parties de l’animal. En Asie, elles sont considérées comme un mets de luxe. Il faut vraiment comprendre que cette activité export n’est donc pas en concurrence de notre activité principale mais bien en complément», précise l’ancien président Norbert Pradalier.
La raison d’être d’APO, c’est le circuit local. En Occitanie, pour un porc élevé dans la région, deux y sont abattus et trois consommés. «Il y a une véritable demande. Et avant tout une demande régionale. Nous avons les outils. Nous souhaitons les faire fonctionner. Alors, comme toutes les filières, nous sommes confrontés au défi du renouvellement des générations. Dans ce cadre, nous lançons un projet d’accompagnement. Nous initions les éleveurs, qui ne sont pas en production porcine, pour diversifier leur production. D’une part parce que ne pas mettre tous les œufs dans le même panier est une stratégie gagnante. Et d’autre part pour le facteur valorisation de l’élevage de porcs. Que ce soit par rapport au lisier, au temps de travail plus souple que d’autres productions et aux débouchés», estime Lionel Tauriac, président d’APO.
Ruissellement de la valeur
La bonne santé de la coopérative signifie un ruissellement vers l’éleveur. «Pour ceux qui feraient le choix d’un atelier secondaire d’engraissement, nous garantissons un revenu. C’est-à-dire qu’à partir du moment où l’éleveur respecte les minimas techniques, le cahier des charges, etc, nous nous engageons à compenser les pertes, si pertes il y a. C’est un moyen de rassurer les éleveurs vis-à-vis de la mauvaise image de la filière, notamment sur l’effet yo-yo des revenus», précise l’ancien président Norbert Pradalier. APO a également construit un filet de sécurité pour ses adhérents. «Depuis deux ans, nous avons mis en place une caisse de péréquation. Suivant les résultats, s’il y a un problème de prix du marché ou une problématique sanitaire qui provoque des remous, l’argent de la caisse sera dirigé vers les éleveurs. Nous jouons jusqu’au bout le jeu de la coopérative. Il faut admettre que ce système de caisse de péréquation n’est pas très répandu en filière porcine», note Mickaël Le Gallic.
Tous ces facteurs sont susceptibles d’attirer des jeunes et susciter de nouvelles passions. Et de sécuriser les éleveurs déjà installés. C’est en tout cas le pari d’APO. «L’enjeu de demain, c’est bien de créer des passions. Le métier d’éleveur porcin est arrangeant au niveau des heures de travail. Nos contraintes sont moins pesantes que dans d’autres filières. Il est plus facile de se dégager des week-ends. Malgré cela, depuis quelques années, nous n’installons plus du tout de nouveaux éleveurs. Alors que la viande porcine est la plus consommée en France. Nous sommes un secteur discret mais stratégique», conclut Lionel Tauriac.
Jérémy Duprat
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