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Par Didier Bouville
Après un premier épisode tourné vers les vaches laitières et le Laguiole, place à une autre production bien aveyronnaise. La ferme que je visite aujourd’hui est située sur le Ségala. Un territoire vallonné du sud-ouest de l’Aveyron, surnommé le pays des cent vallées. Ses paysages sont contrastés, entre fond de vallées et sommet de plateaux. C’est ici que se niche l’Indication Géographique Protégée (IGP) du Veau d’Aveyron et du Ségala. Un label rouge au cahier des charges un peu particulier, qui donne à cette viande une couleur rosée atypique : les veaux tètent sous leur mère deux fois par jour.
Tout cela, c’est Dorian Lacroix qui va me l’expliquer. À 24 ans, il est installé avec ses parents sur la ferme familiale. Tous les 3, ils élèvent une centaine de mères allaitantes de race Limousine l’immense majorité du temps. Mais pour l’instant, sous la chaleur de plomb du mois de mai, la priorité absolue pour Dorian, c’est la récolte de l’herbe fauchée, qui, sous différentes formes, permet de nourrir les animaux. Une période déterminante pour le reste de l’année. Alors, à l’improviste, j’embarque sur un siège de sa machine pour débuter le reportage.
Les conversations nous mènent du machinisme au parcours de Dorian, jusqu’au cahier des charges du Veau d’Aveyron pour finalement atteindre les questions sociétales. Pour Dorian, la génération du « tout, tout de suite », dont nous faisons tout deux partie, n’est pas compatible avec l’élevage. Nous consommons sans réfléchir au travail fourni en amont. Nous exigeons immédiatement des produits qui prennent des mois de labeur à produire. Pour Dorian, un électrochoc pourrait survenir et nous pousserait à revoir radicalement notre philosophie du « tout, tout de suite ». Ce spectre, c’est celui de la faim. Une ombre qui se faufilerait dans le sillage de la guerre en Ukraine et de la flambée des prix.
Jérémy Duprat
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