National | Par Didier Bouville
C’est dans un Finistère marqué par la tempête Ciaran que s’est tenu le 66ème Congrès de Légumes de France. Ce congrès était le dernier de son président, Jacques Rouchaussé, qui ne se représentait pas après onze ans de mandat.
Plus de 400 personnes le 1er jour, 418 participants au diner de gala sur le Pont-Aven, navire amiral de la Brittany Ferries, propriété des légumiers bretons, près de 500 personnes le second jour : ce congrès a été celui de tous les records. Le monde du légume, mais aussi l’ensemble de la filière fruits et légumes, s’étaient mobilisés pour saluer le parcours de Jacques Rouchaussé dont c’était le dernier congrès en tant que président de Légumes de France. Mais l’aspect festif de ce rendez-vous n’a pas empêché les maraîchers de France d’être assidus aux différents travaux. La première table ronde « Transmission et installation : comment les encourager ? » a permis notamment aux coopératives Savéol et Prince de Bretagne, co-organisatrices du congrès aux côtés de Légumes de France, d’exposer leurs actions en faveur de la transmission des exploitations et de l’installation des jeunes maraichers. Savéol, par exemple, a mis en place un système de parrainage pour accompagner le jeune en cours d’installation. La seconde table ronde était consacrée au thème de l’eau.
C’est Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, qui a ouvert la séance des discours par « une pensée pour ceux qui sont impactés par les affres de la météo » en Bretagne et dans le Pas-de-Calais. Sur ce point, après le congrès, le président de la FNSEA a accompagné le ministre de l’Agriculture qui est aller visiter des exploitations du Finistère frappées par la tempête. Il s’est félicité de l’enveloppe de 80 millions d’euros débloquée par le ministère « pour venir en soutien, pour qu’aucun agriculteur ne soit laissé sans solution ». Il a aussi lancé un appel aux assureurs afin qu’ils fassent preuve de diligence dans la gestion des dossiers.
« Ras-le-bol » sur les contrôles et sur les charges
Arnaud Rousseau a ensuite rappelé la mobilisation du réseau cette semaine, une mobilisation qui doit exprimer le « ras-le-bol » des agriculteurs, contre la multiplication des contrôles et l’augmentation des charges. Comme la redevance pour pollution diffuse : +150 % dans le bassin Rhône Méditerranée Corse par exemple. Il a ensuite évoqué les impasses sanitaires. « Beaucoup trop de production, et singulièrement en légumes frais » doivent faire face à des manques de molécules. « Pas d’interdiction sans solution » a-t-il rappelé. Le président de la FNSEA s’est enfin félicité de la reconduction de la mesure TO-DE (suppression des charges pour les saisonniers) tout en rappelant qu’il manque 70 000 emplois en agriculture. « Nous devons être reconnus comme un métier sous tension », a-t-il ajouté. L’agriculture a de lourds investissements devant elle pour faire face au défi climatique et à celui de son impact environnemental. Pour cela, « il faudra que l’agriculture produise. Et ce n’est pas un gros mot ».
Non sans émotion, Jacques Rouchaussé a ensuite prononcé son dernier discours de président. Il a mis l’accent sur le Plan de souveraineté fruits et légumes (dont il a été un des principaux promoteurs avec Laurent Grandin, président d’Interfel). Ce plan, qui est « une reconnaissance de notre filière », « nous y croyons beaucoup, parce qu’il est ambitieux ». Ce plan pluriannuel prévoit d’investir 200 M€ par an. « Nous sommes prêts, mais il manque des ‘petites choses’ ». La filière attend toujours les appels à manifestation d’intérêt, des AMI « adaptés à notre secteur, notamment en ce qui concerne le caractère innovant des projets ». Devant la longueur de la procédure, la filière craint de ne pas pouvoir obtenir cette enveloppe de 200 M€ avant la fin de 2023. « Il va falloir agir vite, le terrain s’impatiente » a martelé Jacques Rouchaussé. La reconquête de la souveraineté passera également par l’emploi. « Il va falloir de la main d’œuvre supplémentaire », poursuit le président qui demande l’extension de l’exonération des cotisations sociales aux travailleurs permanents. Une mesure estimée à 18 M€.
Une souveraineté à reconquérir
« La filière fruits et légumes est symbolique de la souveraineté que l’on a perdue et que l’on doit reconquérir » a répondu Marc Fesneau. Le Plan de souveraineté fait partie des « politiques prioritaires du gouvernement » a-t-il rappelé. « Les attentes sont fortes et l’impatience grandit », a reconnu le ministre de l’Agriculture. « France 2030 est un dispositif complexe, mais c’est une bonne nouvelle d’avoir pu y faire rentrer l’agriculture ». Il s’est engagé à faire assouplir la notion de ‘projets innovants’ porte d’entrée dans France 2030. « L’innovation, c’est que toutes les innovations puissent aller sur les exploitations agricoles ». Ainsi, la liste des matériels pouvant rentrer dans les AMI va être élargie. Le ministre a par ailleurs annoncé l’ouverture « d’ici la fin de l’année » de quatre guichets FranceAgriMer : un sur les serres, un sur les plants et agroéquipements du verger, un sur les autres agroéquipements, et un sur l’outre-mer « afin que les filières ultra-marines disposent d’une enveloppe dédiée pour leurs projets ». Le ministre a également indiqué que les coopératives et les organisations de producteurs (OP) seront éligibles à ces mesures.
La rédaction