Aveyron | Par Jérémy Duprat
Clémence Bernier est installée sur la commune de Lassouts. L’éleveuse est à la pointe de méthodes alternatives pour le soin aux bêtes.
C’est une demande grandissante de l’ensemble de la profession, avec notamment le plan éco-antibio qui a permis de réduire de plus de 50% l’utilisation de ces médicaments en l’espace de 10 ans. Avant de poursuivre, Clémence précise tout de suite qu’elle ne «remet en aucun cas en doute l’efficacité des antibiotiques. Lorsque une bête est malade, qu’il y a un risque sur le troupeau, évidemment que les médicaments sont utiles. Par contre, leur utilisation en prévention, comme c’était la norme pendant longtemps, ne me paraît pas pertinente», explique l’agricultrice.
Utiliser du Kéfir aspergé sur les barrières que les veaux lèchent, acupuncture pour un boiterie, huiles essentielles, aromathérapie… Au travers de formations, Clémence s’est construit un arsenal de pratiques pour prévenir les risques de maladie et améliorer la santé du troupeau. «Les résultats se sont faits sentir petit à petit. Parce qu’il faut du temps pour que la santé du troupeau se construise», dévoile Clémence.
L’éleveuse est fière de son métier et des avancées dans les méthodes de soins aux bêtes. «Quand je me suis installée, j’ai eu des difficultés à trouver ma place. À 22 ans, j’étais à la maternité, alitée à 3 mois de grossesse, et le notaire est venu me faire signer les papiers de mon installation !». Sur la ferme, à son arrivée, tout fonctionnait : «le système roulait tout seul. J’avais besoin de me sentir utile. Le premier hiver, quand il y a des diarrhées sur les veaux, j’ai encore cette discussion avec mon mari en tête. Il me dit d’aller chez le véto chercher un médicament. Je ne réfléchis pas et j’y vais. Puis un jour je lui demande ce que c’est ce médicament. Il me dit que c’est un anti-bio. A partir de là, ça a été un déclic : on donne un antibio aux animaux pour une maladie mais on ne sait pas pourquoi ils sont malades au départ. Ça m’embête de donner un antibio systématiquement sans savoir quoi que ce soit», met en avant Clémence Bernier.
Ni une ni deux, l’éleveuse se met en quête de savoir et d’alternatives. «J’ai suivi une formation en homéopathie à Bozouls, organisée par les JA et l’ADPSA. Nous étions pas mal de la commune à y être allés. J’ai trouvé l’homéopathie un peu compliquée à mettre en place. Il faut aller chercher l’histoire de la maladie, l’histoire de l’animal, pour traiter les symptômes. Avec l’aroma et les huiles essentielles, c’est beaucoup plus simple à comprendre et mettre en place», estime l’éleveuse.
Médecine alternative, médecine traditionnelle, médecine naturelle… «Chacun a son mot. Mais tout le monde s’y met doucement. En tout cas c’est ce que je constate sur les installations de jeunes autour de moi. Je pense que c’est mon côté hors-cadre qui m’a donné cette envie. C’est sûr des fois j’ai des questions bêtes pour un agriculteur qui exerce son métier depuis 30 ans. Pourtant parfois on fait des choses sans trop savoir pourquoi. Mon mari a été très à l’écoute à ce niveau, il n’a pas eu peur de remettre en question des pratiques et de me laisser une place avec mes méthodes de soin aux bêtes», se réjouit Clémence Bernier.
Quant aux attaques contre le monde de l’élevage et les éleveurs, Clémence met les points sur les I. «Nous cherchons à nous améliorer chaque jour. Ce que j’ai envie de dire, c’est : laissez-nous faire notre travail. Je ne viens pas donner des leçons à tous les gens qui achètent une voiture électrique alors que la batterie est fabriquée je ne sais où avec des minerais extrêmement polluants. Je ne fais pas la leçon à quelqu’un qui roule 45 minutes pour aller au travail. Laissez-nous faire notre travail et arrêtez de vous mêler de tout !», martèle l’éleveuse.
Jérémy Duprat