Aveyron | Par Jérémy Duprat
Après la rencontre du 8 juin pour la première circonscription (à lire dans la VP du 9 juin), la même réunion s’est tenue sur la deuxième circonscription, à l’initiative de JA, la Chambre d’agriculture et la FDSEA. 6 candidats ont répondu présents, sur 11 au total, pour présenter durant 5 minutes leur projet pour le monde agricole. Voici les points principaux à retenir.
Dominique Duval – Reconquête
« Ce qui est demandé aux députés, ce n’est pas d’être des spécialistes de chaque sujet. Mais de défendre vos intérêts. Il y a des experts pour préparer et rédiger les lois qui vont bien ».
Alors qu’a concocté l’équipe de Dominique Duval ? « Deux grands axes : le pouvoir d’achat et la ruralité ».
« Vous n’avez pas le monopole de la ruralité. En revanche, les agriculteurs sont les acteurs principaux des campagnes. L’agriculture est constitutive de l’identité de la France. Il faut que cela dure. Nous ne devons pas nous faire déshabiller par des grands groupes extérieurs et devenir un terrain de jeu, un parc Astérix ou un Disneyland ».
Pour le candidat Reconquête, un déséquilibre s’est aggravé entre les grandes métropoles , qui concentrent les moyens financiers et les entreprises, et les campagnes, désinvesties des pouvoirs publics. « Il faut revitaliser les campagnes en redirigeant les fonds public. Deux fois moins d’argent est dépensé pour un habitant du monde rural par rapport à un citadin ».
À quoi servira cet argent ? « Le maintien des écoles. La densification du système de santé. Le redéploiement de gendarmes ».
La grande idée du programme de Dominique Duval concernant les agriculteurs : mieux vivre de son métier. Pour cela, il propose de lutter contre la concurrence déloyale, notamment en interdisant les importations dont la production ne respecte pas nos normes. Des moratoires sur les traités de libre échange seront proposés.
Il faudra également « fixer les prix des produits », pour garantir un revenu juste aux éleveurs.
Du côté du régime de santé, le candidat Reconquête propose de revoir la loi sur le congé maladie : « on ne peut pas prévoir à l’avance combien de jours un agriculteur tombera malade ». Idem pour l’assurance concernant les aléas climatiques.
Pour pérenniser les fermes aveyronnaises, il faut «mettre fin au droit de donation et de succession » et simplifier les règles d’installations pour favoriser le renouvellement des générations.
Pour terminer, le candidat a insisté sur la « simplification ». « Nous devons cesser d’accabler les paysans avec toujours plus de contraintes ». Il vise, entre autres, la surtransposition des règles européennes qui favorise la concurrence étrangère.
Éric Cantournet – Parti radical de gauche (PRG)
« L’agriculture est une fierté aveyronnaise, un secteur qui compte beaucoup pour notre département. Les agriculteurs ont fait beaucoup d’efforts, il faut arrêter de leur taper dessus. C’est un métier difficile qu’il faut valoriser ».
L’objectif essentiel d’Éric Cantournet : « la rémunération des agriculteurs ». Pour cela, il propose de sécuriser les producteurs. Il fustige des lois, Egalim 1 et 2, qui ne sont pas appliqué. « C’est très Français. On vote des lois, mais on ne l’État ne les fait pas respecter ».
Au-delà des lois, le candidat du PRG note un « déséquilibre lors des négociations entre les agriculteurs et les acheteurs. Le défi, c’est de construire des prix à travers ce rapport de force inégal ». L’État doit avoir un rôle central sur cet aspect-là.
Éric Cantournet note que l’Aveyron propose une agriculture de qualité avec une valeur ajoutée importante. « Il y a des nombreux signes officiels de qualité, ou pas d’ailleurs : ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de label ou de signe que le produit n’est pas de qualité ». Le candidat propose de renforcer l’identité de notre département par rapport à ces productions.
Troisième point important : la jeunesse et le renouvellement des générations. « Sur notre circonscription, il y a plusieurs établissements d’enseignement agricole. C’est un fait très important. Il faut une meilleure reconnaissance et une meilleure valorisation de l’enseignement agricole ». Les établissements doivent être connectés avec le territoire. Sauf qu’au niveau budgétaire, les moyens ne suivent pas. « Il y a une nécessité d’augmenter le budget pour l’enseignement agricole ».
Samuel Deguara – LREM
« L’agriculture aveyronnaise est une fierté. Nous avons tous des ancêtres agriculteurs. Il faut en avoir conscience ».
Le candidat de la majorité présidentielle s’est ensuite fait le défenseur du bilan d’Emmanuel Macron et de ses gouvernements. « En terme de méthode, les agriculteurs ont toujours été associés aux décisions. Elles ne se font pas contre vous mais avec vous ».
Sur les 5 années écoulées, et pour le prochain mandat, Samuel Deguara insiste sur le renforcement du modèle agricole. «Le pérenniser et l’adapter. Vous devez produire en réussissant la transition vers une agriculture durable ».
Deux objectifs. D’abord, « agir pour assurer la souveraineté alimentaire. Et agir pour que les agriculteurs puissent vivre de leur travail ».
Pour cela, trois priorités. Le renouvellement des générations en premier lieu. Le candidat LREM propose le renforcement des formations agricoles pour développer chez les jeunes de nouvelles compétences. « Ensuite vous le savez déjà, le Président l’a annoncé, c’est une grande loi d’avenir et d’orientation de l’agriculture ». Celle-ci vise à rendre plus facile le parcours d’installation et favoriser l’accès au foncier.
Vient ensuite la rémunération. « La loi Egalim 1 et 2 ont vu le jour. Il faut veiller à l’application de la loi via des contrôles et donc avec des moyens pour effectuer ces contrôles ». Samuel Deguara propose ensuite de poursuivre la baisse des impôts de production et la suppression de la CVAE (Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises). Pour valoriser la production agricole, le candidat LREM estime qu’une reconnaissance des produits locaux doit être établie. « Avec quelle définition? Je suis à votre écoute pour travailler ensemble à une définition plus réglementaire et législative ».
Et pour finir, Samuel Deguara a appuyé son propos sur l’adaptation au changement climatique. Le candidat souhaite doter l’agriculture d’une capacité d’adaptation pour « créer les conditions d’une croissance durable ». Pour lui, l’Aveyron et le Massif Central prennent le bon chemin, avec le programme AP3C. Il rappelle également le nouveau régime d’assurance face aux risques climatiques qui entre en vigueur le 1er janvier prochain. « Le modèle agricole doit sortir de la productivité pour aller vers une production durable. Au niveau social, environnemental, normatif et sanitaire ».
Florian Barthe – Résistons
« J’ai discuté avec des personnes en ville qui ne connaissent pas le métier d’agriculteurs. J’ai des réponses de gens qui pensent que nous promenons des brebis. L’enjeu numéro un, c’est de faire connaître ce métier, montrer toutes les difficultés qui lui sont propres ».
Avec l’augmentation des coûts et les mutations du modèle agricole, Florian Barthe propose de revoir la méthode de distribution des aides de la PAC, en passant d’un critère à l’hectare à un système par tête, « qui nous serait plus favorable ».
Le candidat Résistons propose également des aides pour la reprise de fermes.
Il s’attaque ensuite au problème des retraites. « Je prends l’exemple de ma mère qui touche 800 euros. Ce n’est pas possible de passer une vie à travailler pour toucher si peu. Le système de cotisation doit être revu.
Le dernier point « le plus important » aux yeux de Florian Barthe : protéger les agriculteurs. « Il y a un vrai mal-être. Nous ne parlons pas assez des suicides, qui passent discrètement dans les médias. De l’autre côté, beaucoup de citadins reviennent à la campagne. Et puis des familles se retrouvent au tribunal pour une affaire de coq qui chante. Personne ne parle du désespoir de ces familles ». Le candidat Résistons fustige la « pression constante » sur les épaules des agriculteurs. « Elle dépend du climat, des interrogations sur nos investissements, la sécheresse, les vautours… C’est mon cheval de bataille : promouvoir une meilleure image des agriculteurs et les défendre. Les lois seront passées en ce sens ».
André At – LR
« L’agriculture au cœur des défis du siècle ». D’abord pour nourrir la population. « On nous montre ces rayons qui se vident en Russie. Mais on s’aperçoit qu’ici aussi, le phénomène prend. Personne ne pensait cela possible ». André At déplore le déclassement de la France au niveau agricole.
Pour redorer ce blason, le candidat LR souhaite s’attaquer au défi de l’écologie. «Nous sommes les premiers écologistes de France. Les touristes sont bien contents des paysages façonnés par les agriculteurs ».
Pour pérenniser cela, le candidat LR l’assure : il faut une « agriculture de production, pas du jardinage ». Le productivisme aujourd’hui n’est pas celui d’hier. « Nous avons des outils de précision qui nous permettent de mieux gérer, notamment au niveau des produits phytosanitaires ».
André At fustige ce yo-yo permanent depuis des décennies. « On a dit à mes parents dans les années 60 qu’il fallait produire plus. Ils l’ont fait. Quand je me suis installé dans les années 90, on nous a dit qu’il fallait produire mieux. Ce que nous avons fait avec les labels et les signes officiels. Aujourd’hui, il faut produire plus à nouveau et Denormandie a raison. Mais il faut aussi un nombre d’agriculteurs suffisant ». Il affirme que pour produire, un plus grand nombre d’agriculteurs sera nécessaire, puisque ceux déjà présent sont au maximum de leur capacité. Et pour attirer de nouveaux venus, un « revenu suffisant » doit être assuré.
André At est revenu sur Egalim 1, vendue comme « la panacée. J’avais publié un article pour dire que l’on faisait culpabiliser le consommateur, qui lui même n’a pas un pouvoir d’achat élevé, il faut le rappeler. La loi le contraint à payer plus alors que les grandes surfaces s’assurent davantage de marge ». Avec Egalim 2, le candidat l’assure, « nous avons du mal à faire confiance. Je suis contre l’obligation et pour la loi du marché. En vin, ils vendent sans contrat et s’en sortent bien. Le prix des céréales augmente et pourtant, il ne contractualise pas. Les gens qui vendent de la viande bovine sans contrat le font à des prix aussi élevés que les autres.
Pour terminer, André At a tenu à « saluer les initiatives JA, avec la charte d’installation signée il y a un an. Ils montrent la modernité du métier. Il est important pour eux et pour nous tous de continuer et de rentrer dans les conseils municipaux. Car nous sommes de moins en moins présents. Nous devons maintenir notre rang ».
Laurent Alexandre – NUPES
« Le monde agricole n’est pas ma spécialité. Mais le travail de député c’est de se faire encadrer et de se faire aider. C’est pour cela que je suis venu avec mes deux conseillers du monde agricole ».
Pour Laurent Alexandre, un grand objectif s’il est élu député : « venir au contact des gens et élaborer avec vous les lois pour vous défendre. Ce travail, il ne se fait pas tout seul à l’Assemblée nationale ». Ce qui a motivé le candidat NUPES à venir lors de cette rencontre, c’est moins de parler de son programme que d’écouter les problématiques des agriculteurs présents.
Pour autant, quelques sujets interpellent Laurent Alexandre. D’abord, les revenus « pour vivre dignement de son travail ».
Vient ensuite la question sociale. « La retraite. Le foncier avec la problématique de l’installation. Nous avons également rencontré des psy pour qu’il nous explique ce qu’il se passe dans le monde agricole. Pourquoi il y a autant de suicide ».
Le candidat souhaite également revoir la loi Egalim sans sa totalité.
« J’entends deux mondes qui s’opposent, le monde urbain et le monde rural. Tout est intimement lié, l’un a besoin de l’autre. Il ne faut pas les opposer ».
« Je suis prêt à discuter avec vous pour construire quelque chose ensemble ».
Jérémy Duprat