National | Par Didier Bouville

Cadre financier 2021-2027: la PAC perd 5 Mrds € dans la dernière ligne droite…

Photo elysees.fr

Après quatre jours de pourparlers, les chefs d’État et de gouvernement de l’UE sont parvenus, le 21 juillet au petit matin à un accord à l’unanimité sur le cadre financier pluriannuel de l’UE pour 2021-2027 de 1074,3 milliards d’euros et un Plan de relance de l’économie post-Covid-19 doté de 750 milliards d’euros.

La Pac hérite d’un budget de 336,4 Mrds dont 258,6 Mrds pour les paiements directs et les mesures de marché et 77,8 Mrds pour le développement rural. Le développement rural voit son enveloppe légèrement revue à la hausse par rapport à la proposition du mois de mai 2020 de la Commission européenne de 75 Mrds € mais dans le même temps les 15 milliards € prévus pour le développement rural dans le plan de relance post-Covid-19 sont réduits de moitié à 7,5 Mrds €. Une baisse qui s’explique par la réduction de la part de subventions (par rapport aux prêts) voulue par les pays dits frugaux dans le cadre du plan de relance.

Au total la Pac perd donc environ 5 Mrds €. Pour 2014-2020, la Pac actuelle disposait (en prix 2011) d’un budget de 373 Mrds € dont 277,9 Mrds pour le premier pilier. En euros courant (avec une inflation de 2% prise en compte) et à périmètre constant (UE-27), le budget de la Pac pour 2021-2027 est globalement maintenu par rapport à la période 2014-2020 mais en euros constant (2018) il enregistre quand même une baisse qui peut-être évaluée à quelque 39 Mrds €.

…et subit quelques modifications

Les discussions entre les dirigeants européens ont porté sur les enveloppes budgétaires de la future Pac mais également sur certains aspects financiers et notamment le plafonnement à 100000€ des aides directes par exploitation qui ne sera finalement pas rendu obligatoire pour les États membres contrairement à ce qui était prévu initialement. Autre changement : les États membres pourront transférer jusqu’à 25% de leurs enveloppes du 1er vers le 2nd pilier et inversement (contre 15% dans la proposition initiale). La convergence externe des niveaux de paiements directs (entre anciens et nouveaux Etats membres) se poursuivra et «tous les États membres auront un niveau d’au moins 200€/ha en 2022 et d’au moins 215€/ha d’ici 2027», précise le texte final.

Des bonus par rapport à la clé de répartition normale des fonds de la Pac ont par ailleurs été accordés à certaines Etats membre: 1600 millions d’euros pour la France, 650 Mio pour l’Allemagne, 500 Mio pour l’Espagne, 500 Mio pour l’Italie, 400 Mio pour la Finlande, 300 Mio pour le Portugal, 300 Mio pour la Grèce, 300 Mio pour l’Irlande, 250 Mio pour l’Autriche, 200 Mio pour la Slovaquie, 100 Mio pour la Belgique, 100 Mio pour la Croatie, et 50 Mio pour Chypre.

La réserve agricole sera limité à 450 Mio€ en prix courants au début de chaque année et réapprovisionnée, si besoin, par les marges disponibles et en dernier recours le mécanisme de discipline financière (réduction des paiements directs). L’accord final entre les Vingt-sept confirme enfin que la part des dépenses de la Pac qui devrait être consacrée à l’action en faveur du climat sera de 40%.

PAC 2021-2027: un budget «stable» pour la France par rapport à la période actuelle

L’accord trouvé le 21 juillet sur le cadre financier pluriannuel de l’UE pour 2021-2027 conduit à un budget de la Pac «stable» pour la France, à 62,4 milliards d’euros (courants) contre 62 milliards sur la période actuelle, calcule le cabinet du ministre de l’Agriculture. Ce montant inclut le Feader (2nd pilier) et le Feaga (1er pilier) hors mesures de marché. Dans le détail, le Feader qui reviendra à la France s’élève à 11,4 milliards d’euros contre 10 milliards sur la période actuelle. Ce montant a fait l’objet de négociations jusque dans les dernières heures de négociations, selon le cabinet.

Enfin, 51 milliards d’euros d’aides directes du Feaga reviennent à la France, contre 52 milliards sur la période actuelle. Ce montant en baisse est notamment du au mécanisme de «convergence externe», qui profite aux pays les plus récemment entrés en UE (pays de l’est). Le cabinet rappelle d’ores et déjà que «les deux piliers ne sont pas étanches». Le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie s’est félicité du résultat des négociations: «La France s’est beaucoup battue pour avoir une Pac à la hauteur de ses attentes, et c’est le cas. Nous avons une Pac ambitieuse avec un budget renforcé. Et ce n’était pas gagné».

«Une ambition à consolider pour la Pac» selon la FNSEA et les JA

La FNSEA et JA saluent dans un communiqué commun diffusé le 21 juillet «l’accord trouvé par les chefs d’État et de gouvernement». Dans cette négociation, le chef de l’État «a su défendre l’intérêt européen et limiter la casse pour le secteur agricole», pour les deux syndicats. Mais il s’agit pour les deux organisations d’«une ambition à consolider pour la Pac» ; ils estiment en effet qu’il faudra «être vigilant sur l’ambition de la Commission» dans les stratégies «Farm to fork» et Biodiversité 2030 visant à accélérer les transitions, notamment écologiques, de l’agriculture.

Avec des moyens supplémentaires limités, «les objectifs devront être adaptés: difficile de demander aux agriculteurs de faire plus sans leur en donner les capacités financières». Les négociations sur les outils de la Pac vont maintenant démarrer. «Nous attendons de l’UE qu’elle affirme clairement son ambition pour le renouvellement des générations d’agriculteurs et leur mission première : celle de contribuer à sa souveraineté alimentaire», insiste le communiqué commun.

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